De BROC Nathalie / La rivière retrouvée.
La
rivière retrouvée.
Nathalie de BROC.
Note
: 4,5 / 5.
Retour
aux sources.
Suite
de « Loin de la rivière », ce livre marque le retour
d'Herminie et d'Armand sur les bords de l'Odet. Juliette,
après son renvoi de Kerbrénou pour cause de grossesse hors
mariage, vit désormais à Paris dans une Société Philanthropique
hébergeant de futures filles mères.
Après
avoir plusieurs fois envisagé le suicide, elle se résigne. Une autre
pensionnaire en fouillant dans ses affaires découvre ses « Cahiers
bleus », dans lesquels elle relate la vie de sa grand-mère
Herminie, et il y en a des choses à dire.
Un
des retours d'Armand et d'Herminie en Bretagne se prolonge pour cause
de première guerre mondiale, Armand partira combattre, la guerre
l'épargnera, pas la maladie, il meurt au printemps 1919, laissant sa
veuve désemparée ! La
vie reprend son cours, Herminie, qui a retrouvé sa vieille amie
Lyane et tenté de renouer avec son fils Édouard qui s'est engagé
dans la marine, se retrouve seule, car un des piliers de la maison
Baptistine, la mémoire de la famille décède également.
Malgré
tout, l'eau coule dans l'Odet, les jours s'écoulent, et la vie
reprend ses droits....Édouard très amoureux se marie, Diane, son
épouse, lui donne deux enfants, Juliette et Raoul, les temps
heureux...mais le destin ne l'entend pas de cette oreille et
Kerbrénou n'est pas épargné par le malheur. Diane, malade, décède.
Édouard qui avait quitté la marine se remarie avec Nine. Commence
alors une période de bonheur qui sera de courte durée, qui prendra
fin à la suite d'un grave accident domestique dont est victime
Raoul, le jeune fils d’Édouard, et celui-ci décide de reprendre
du service dans la marine, mais une menace plus grave se précise.
Car
la guerre aussi ici arrive...et le monde en est bouleversé, car
entre temps la famille s'est agrandie...
En Bretagne comme
ailleurs, les discussions vont bon train, la politique accapare
l'esprit des hommes qui se divisent sur le sujet, mais certains
devront partir. Pour combien de temps et combien parmi eux en
reviendront? Pour les femmes aussi une période sombre
s'annonce....très sombre pour certaines en ces temps d'occupation.
Mais
obstinément, contre vents et marées, la vie continue, les
naissances succédant aux morts.
Nous
retrouvons donc les protagonistes de « Loin de la rivière ».
Juliette tente de faire revivre l'époque troublée, mais heureuse de
sa famille, en particulier sa grand-mère. Elle doit également
affronter sa propre vie, avec ses peines et ses déchirements. Elle
est seule à Paris, avec cette grossesse non désirée, sa seule joie
: se replonger dans la vie de sa grand-mère et de Kerbrénou. Herminie,
veuve pour la seconde fois. Elle se replie sur elle même,
accueillante malgré les épreuves, Armand est mort, Baptistine
également, Édouard est au loin, mais elle trouvera une alliée en
la personne de Nine, elles partageront un grand projet, rendre à la
demeure familiale sa grandeur d’antan. Lyane,
son amie de longue date, avec laquelle, après une période de
brouille (ah les hommes !), elles se sont réconciliées, Lyane est
veuve aussi, mais son mari a eu la décence de mourir rapidement et
de lui laisser une part de sa fortune. Edouard, le fils du premier
mariage d'Herminie, éprouve une sorte d'aversion pour sa mère,
qu'il n'a peu connu en fait, lui restant en Bretagne, elle vivant au
Canada. Nine
de Célian est un nouveau personnage de ce roman, noble désargentée,
ne s'estimant pas réellement gâtée par la nature, elle deviendra
une des principales protagonistes de cette histoire, sûrement grâce
à sa fausse discrétion.....et une volonté farouche de comprendre
les difficiles relations entre son mari et sa mère, et aussi de
supplanter Diane dans le coeur de son époux.
Toujours
une très belle écriture, comme pour « Loin de la rivière »,
le récit est double et sur deux époques différentes, la fin de la
Grande Guerre pour Herminie et les années suivant la Seconde Guerre
mondiale pour Juliette.
J'ai
un « reproche » à faire à l'auteure, avoir fait
mourir Baptistine si vite ! J'adorais ce personnage de vieille
Bigoudène en coiffe, conteuse bretonnante, bougonne, fichu
caractère, d'éternelle mauvaise humeur, mais tellement attachante.
Extraits
:
-
Elle a gardé ce fichu locataire qui encombre ses gestes, ses nuits.
Qu'il lui fout en l'air sa vie.
-
Camille fixait l'avant-bras dénudé comme si elle avait le diable
devant les yeux. Le 87 156 les narguait.
-
Ce rire, jamais il ne l'a partagé avec elle. Il avait d'autres
sentiments en réserve à son intention.
-
Dieu fasse que celle qui viendra à Kerbrénou l'aime autant
qu'elle-même l'a aimé.
-
Voilà pourquoi, si elle les espère, Nine redoutent les jours
bretons.
-
La Veuve noire est à Kerbrénou.
- Coiffe penchée, ruban sur la nuque, une jeune fille est installée
sur un banc.
-
Nine est stupéfaite. Deux étrangers eussent montré plus de chaleur
que ces deux-là.
-
Bien sûr quelques éclaircies surviennent, mais, à l'image du ciel
breton, vite balayé d'ardoise et de gris, voire d'une ondée.
-
Vous êtes du même monde, celui qu'on piétine ! Votre place n'a
jamais été et ne sera jamais ici dans cette maison. Ou alors à
l'office !
-
Bien sûr que si c'est ma mère !
-
Qui a pu avoir l'idée de qualifier cette guerre de « drôle »
après la Grande?
-
Il parle le chien. C'est sa langue, comme Marguerite parle breton à
ses casseroles quand elle est seule.
Éditions
: Presses de la Cité (2008)
Autres
romans chroniqués sur ce blog :
La
tête en arrière.
La
dame des forges.
Fleur
de sable.
Loin
de la rivière.