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Littérature d'Irlande,de Bretagne et aussi d'ailleurs
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4 juin 2011

Collectif / Shangai, fantômes sans concession.

Fantomes
Shanghai, fantômes sans concessions.
Collectif/ Romans d'une ville.

Note : 4,5 / 5.
Fantômes et fantasmes.....
Cinq auteurs seulement pour ce court recueil, cinq femmes : Wang Anyi, Chen Danyan, Wei Hui, Cheng Naishan, Tang Ying, pour autant de destins féminins dans une ville et une époque oscillant entre passé et modernité.
« La chambre de l'amant » débute ce recueil. Tout est étrange, la narration, soixante quatorze groupes de lignes pour le récit et quatre pour l'épilogue, variant parfois d'une seule ligne à une demie page. Nous faisons la connaissance d'une femme seule, sortant d'un hôpital suite au décès tragique de ses parents. Elle voudrait être romancière, mais passe ses nuits à espionner deux fenêtres d'un bâtiment situé en face de chez elle ! Un jour elle traverse la rue....Peu de personnages, cette femme, le mystérieux voisin, un jeune homme courtier en assurances, un vieillard préposé à l’ascenseur, pour un texte osé sur l'amour qui dévie jusqu'à l’obsession sexuelle et une forme de folie.
Très marquant et original.
« Linda fille de bar » est d'une écriture plus classique mais également très dépaysant. Linda est entraineuse dans une boîte de nuit plutôt bas de gamme. Sa vie n'est pas reluisante, elle habite avec ses parents un taudis malodorant, mais son charme lui ouvre des portes et le cœur de certains hommes. Elle ne rechigne pas à chiper les petits amis de ses consœurs pour mieux les larguer ensuite. Bref une mentalité un peu douteuse, mais elle a un rêve : devenir une artiste peintre reconnue. Pour cela elle prend des cours aux beaux-arts et elle part en stage à la campagne cherchant à se rapprocher du professeur de dessin....
Une belle histoire avec un format inhabituel pour une nouvelle, presque cinquante pages.Quelques lignes ne sont pas en l'honneur de certains occidentaux vis à vis de la population chinoise, surtout féminine.
« Valses d'un hiver », très beau texte plein de nostalgie. En pleine révolution culturelle, une adolescente, au contact de sa mère digne représentante d'une ancienne bourgeoisie shanghaienne, découvre le bal et les valses de Strauss. Quelque chose lui semble complètement démodé dans ce genre de rencontres, mais petit à petit elle se sent prise au jeu. Hélas, ce changement de vie et d'époque n'amènera pas que du bonheur.
« Ton nom, mon prénom » la beauté des villes dépend-elle de la beauté de ses habitantes ? C'est la question que pose ce texte. On apprend également beaucoup des petits gestes qui semblent frivoles pour garder un semblant de coquetterie ! Par exemple se passer du baume en tube sur les lèvres, en imitant le geste très féminin de se remettre du rouge à lèvres ! Quant à la mode vestimentaire en ces années d'uniformité, là non plus les idées ne manquaient pas. Un texte qui parfois ressemble plus à un essai qu'à une nouvelle, mais très instructif pour comprendre l'influence des femmes sur l'histoire de la ville au quotidien. Une petite liste de ses beautés locales, ou personnages ayant laissé leurs empreintes dans l'esprit des gens ; Eileen Chang, romancière, Sai Jinhua, courtisane qui sauva la Cité Interdite de la destruction, Zhang Zhiyun, actrice...etc...sans oublier les « Shangai Babies » avec Madame Zhong comme exemple.
Un constat social pour le moins surprenant et alambiqué ! Les apparences, toujours les apparences...
« Ruelles » est un très court texte qui termine ce recueil. Son titre est la traduction la plus approchante possible d'un mot chinois « Longtang » qui n'a pas d'équivalent en français. Une promenade nostalgique dans la vieille ville et ses particularités. Une très belle description pleine de tendresse et de pudeur.
Des femmes dont certaines aimeraient un destin artistique, écrivain ou peintre, vastes espoirs ou projets trop audacieux, suivant leurs conditions sociales. Une autre voulant garder son identité, ses racines, tente d'oublier des années de révolution culturelle.
Un mot des auteures que l'on peut qualifier de contemporaines, car nées entre 1946 et 1973, elles ont chacune leur style propre avec une petite préférence pour Wei Hui et « La chambre de l'amant » qui est aussi la plus jeune des cinq.
Une découverte, mais ce recueil n'est pas réellement à sa place dans cette collection, ce qui n'enlève rien à ses qualités.
Extraits :
- Elle ferme les yeux, les gouttes d'eau chaude laissent de petites traces sur sa peau et un irrépressible désir monte en elle, sous le mouvement de ses doigts, son corps gémit, se tord, et explose.
- Elle reste enfermée avec lui plusieurs jours. Chaque orgasme est une rencontre avec l'homme aux cheveux longs, celui avec qui elle ne fait pas l'amour.
- La vie est ainsi faite : tout peut vous arriver et c'est comme si rien ne vous était arrivé.
- Le miroir lui renvoie ses traits tirés, encore accentués par le maquillage, les traits d'une fille qui aurait trop traîné dans la nuit.
- Au moment de se quitter, elle lui avait dit : « Ne te fais pas avoir par cette saloperie d'amour ! »
- Avec l'âge, ces années me parurent naïves et frivoles, et pourtant si difficile à oublier.
- Cette nouvelle époque était tellement inopinée qu'elle déstabilisa beaucoup de monde. Les gens croyaient le bonheur proche, pourquoi furent-ils happés par la tragédie ?
- Les hommes espèrent toujours être le premier amant d'une femme et les femmes être la dernière compagne d'un homme.
- « Une femme, si elle est seulement jolie, à quoi sert-elle ? L'important, ce sont ses capacités.... »
- L'éclat de ce Paris de l'Orient se déploie sur ce fond d'ombre depuis plusieurs dizaines d'années. À présent, tout semble vieux, laissant peu à peu apparaître les marques du temps.
- Les ruelles de Shanghai sont sensuelles, intimes comme le contact de la peau ; fraîches et tièdes au toucher, elles gardent secrets leurs émois.
Éditions : Autrement/ Romans d'une ville. (2004)

 

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Commentaires
E
Bonjour Gwenaëlle.<br /> Autres pays autres mœurs...un recueil de nouvelles très intéressant. Il me reste dans ma bibliothèque de quoi faire encore une semaine des villes noires en fin d'année (ou avant, selon l'humeur!)<br /> Bises et à bientôt.<br /> Yvon
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G
C'est assez tentant! Je viens de lire des nouvelles d'un écrivain algérien d'où les femmes sont presque absentes. Quel contraste! ;-)
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