HINAULT Caroline / Solak.

Solak.
Prix du festival du roman policier de Villeneuve lez Avignon.
Caroline HINAULT.
Note : 4, 5 / 5.
Survivre à la grande Nuit.
Autrice que je découvre avec ce roman qui est d’ailleurs son premier, se déroulant dans ce que l’on peut nommer sans se tromper « Le Grand Nord ».
Nous sommes, comme le dit le début de ce roman :
« Quelque part au Nord du cercle arctique avant la fin du siècle dernier ».
Pour être plus précis dans la presqu’île (imaginaire) de Solak.
L’action se déroule entre les mois d’août et mars de l’année suivante pendant la période de la « grande Nuit » qui dure plusieurs mois.
Ils sont quatre, trois militaires qui gardent le drapeau symbolique de leur pays.
Et un scientifique un peu à l’écart du reste de l’équipe.
Un des militaires Igor se suicide. Il est remplacé par ce qui semble être une jeune recrue, qui devient rapidement « Le Gamin ». Dire que pour lui l’accueil est chaleureux serait mentir. Roq est plus intéressé par l’arrivage de vodka dont il commence à user, pour ne pas dire abuser. Les autres semblent surpris par sa jeunesse. Second souci, il est silencieux, car muet ! Chose qui ne va pas faciliter son intégration.
La « grande Nuit », et le froid qui va avec, approche à grands pas. Période difficile, s’il en est ; la tension entre ces hommes prisonniers sans barreaux dans l’immensité glacée augmente.
Aucun des autres membres de l’expédition n’apprécie le comportement brutal de Roq : sa consommation d’alcool, sa jouissance quand il tue des animaux, même pas mangeables.
Le Gamin se rapproche de Grizzli qu’il accompagne souvent dans ses expéditions scientifiques à la recherche de carottes de glace en vue d’analyses.
Piotr, lui, regarde tout cela tout en restant très neutre…
Mais le drame semble inéluctable. Trop de tension entre ces hommes obligés de cohabiter dans des conditions extrêmes.
Peu de personnages, quatre en tout et pour tout. Piotr, le narrateur, il est sur place depuis très longtemps, il est, sur le papier, le chef des militaires. Il est surtout un observateur tâchant d’être le plus diplomate possible.
Roq, pas mal porté sur la bouteille, est une sorte de brute épaisse, chasseur ou plutôt tueur. Il fait un commerce clandestin de peaux d’animaux qu’il tue. Sinon sa distraction favorite est d’ingurgiter de la vodka et de s’en prendre au reste de l’équipe.
Grizzly, le scientifique de l’équipe, il croit à un monde meilleur, mais il ne semble pas à sa place dans ce monde militarisé. Il a eu un accrochage dès son arrivée avec Roq, et depuis ne se mêle plus des affaires des autres.
Le Gamin, la nouvelle recrue, il semble trop jeune pour vivre avec ses compagnons, pas assez mûr et trop frêle, et pourtant !
Une très belle écriture, une fin d’un côté prévisible, mais d’un autre côté très inattendue.
Une découverte.
Extraits :
- Fin comme une anguille, mais ça puait l'écorché. Le coriace. Les emmerdes je me suis dit.
- Bois, bois, je te dis, bois tant que le couvercle ne s'est pas encore refermé sur nous.
- Et puis de toute façon ici, le vrai chef, le tyran, c'est la survie, cette chienne de survie qui nous tient par les tripes, les crocs bien plantés dans les intestins sans jamais lâcher son paquet de viscères.
- En attendant, le gosse s'est drôlement bien adapté au jour continu.
- Si je suis resté sur Solak, c'est pas pour tailler la discussion mais supporter ma haine des vivants.
- Dans un endroit comme Solak où on est quatre bonhommes obligés de frayer ensemble sur un bout de presqu'île glacée, il y a un contrat tacite pendant la grande Nuit.
- On passait le plus clair de notre temps chacun dans notre baraquement, prostré sous les couvertures.
- Sa main droite appuyait avec la lame sur la peau du cou, pas pour faire semblant.
- Peut-être que c'était dans l'ordre des choses après tout.
Éditions : Rouergue Noir. (2021).

La lauréate et les membres du jury.