DARCEL Frank / Le dériveur

Le dériveur.
Frank DARCEL.
Note : 4 / 5.
Après la nuit, vient l'Aurore.
J'ai lu de cet auteur une nouvelle publiée dans « Dernières nouvelles de Guérande », il est aussi très connu dans le milieu musical, comme créateur du groupe « Marquis de Sade ». Nous nous  sommes rencontrés au début de l'année dernière à Larmor, et il sera lui aussi à « La rue des livres », quartier de Maurepas à Rennes, le 13 mars prochain.
Max Guennec travaille chez un poissonnier. Après une jeunesse difficile, la vie semble enfin lui sourire. Ses parents sont morts dans un accident de voiture, la DS familiale ayant quitté la route une nuit. Lui a été éjecté, et a passé plusieurs mois dans le coma! Ses souvenirs de l'époque ne sont pas totalement revenus. Depuis ce temps là, il est suivi par le docteur Lossouarn, psychiatre, mais le temps a passé. Max s'est engagé dans les commandos de marine, où il a, comme il le dit, « récolté quelques cicatrices et un certain penchant pour l'alcool. » Il est marié à Annie, très belle et intelligente ; elle travaille en préparant son agrégation. Mais Max, depuis leur mariage près de Belle-Isle en Terre, sent confusément que quelque chose ne va pas!  Et Annie disparaît et il cherche comment et surtout pourquoi, il se rend compte qu'il ne connaissait pas réellement son épouse! Alors, il cherche, Marylène, une amie, lui explique qu'Annie sur internet avait fait la connaissance d'un groupe d'amitiés, des femmes qui correspondaient entre elles au sujet d'un homme, John Ollivier! Mais Annie a fait vider son ordinateur ; à son travail, il apprend qu'elle a pris une année sabbatique, chose qu'il ignorait, et qu'elle était en pourparlers avec l' école d'une ville nommée Aurora. Mais plus de douze villes des Etats-Unis portent ce nom! Alors, la seule solution est de tout quitter, Lorient,  sa vie ou ce qu'il en reste. Marylène lui communique un nom, Ann Reed, la correspondante d'Annie qui habite New-York où il a un vague cousin qui a quitté Gourin, il y a des années. Lossouarn lui prodigue quelques conseils, et vogue la galère....
Max Guennec est un personnage attachant, confronté à la mort de ses parents, après un coma prolongé et une période d'errance personnelle, il semble enfin être heureux.  Annie Guennec passera dans ce livre comme un courant d'air et l'auteur ne lui laissera pas d'espoir de pardon. Le docteur Lossouarn, dit Bulle, est à la foi, le médecin, l'ami, le confident et le grand frère. Mais cette conversation dans sa voiture en direction de l'aéroport, ces futures expériences  sur l'inconscient, en quoi peuvent-elles concerner Max? Marylène, la pauvre fille, lui donne certains renseignements, mais est-elle si désintéressée que cela? Est-ce une sorte de vengeance de sa part?  Contre Erwan, ancienne connaissance d'école de Max, le salaud de service dont Marylène est enceinte, mais il est déjà marié? Max aussi aimerait régler certains comptes avec lui, mais il se calme malgré les allusions à peine voilées d'Erwan au sujet de son père et sur les circonstances de l'accident qui a coûté la vie à sa famille.
A New-York, il rencontrera Ann qui lui indiquera que le but de son voyage est Aurora, dans le Nebraska, en plein cœur de l'Amérique profonde, mais pour Max, la quête n'est pas close, il lui reste à rencontrer Annie et enfin comprendre ce qui reste enfoui dans sa mémoire. La première partie du livre n'est pas dépaysante, elle se passe en effet à Lorient. C'est amusant qu'une partie de l'action se passa aux Halles de Merville où je vais parfois, qu'un des personnages travaille au lycée où mes filles étaient scolarisées et que Max habite Quai des Indes qui est un de mes lieux de promenades préférés!La quête d'un homme dans une sorte de road-movie, à la recherche de son épouse, mais pas que d'elle, mais cela il l'ignore! Et nous aussi, et cet aspect du récit donne un dénouement inattendu.
A la fin de ce livre, je me pose une question. Pourquoi j'ai attendu si longtemps pour le lire? Une découverte et un très bon premier roman.
Extraits :
- Qu'est-ce que tu cherches dans ce bon Dieu de Net?
Ce que Lorient ne me donne pas...
- Ma désagrégation à moi s'annonçait.
- La Bretagne était la capitale mondiale du suicide, et Bulle avait des théories là-dessus, ils pensaient que c'était intimement lié à la perte de notre identité collective à nous, Bretons.
- Presque toute la ville était comme ça, refaite à la hâte, redessinée sévèrement, ressurgie du néant provoqué par les bombes alliées.
- Elle est jolie et intelligente. La classe pour cette ville de prolos...
- Il allait bien falloir que quelqu'un finisse par payer pour tous ces affronts....Tu connais Kerouac ? demanda le docteur.....
On a étudié « Sur la route » au lycée.
Bien, tu sais qu'il a écrit son dernier livre à propos d'un voyage en Bretagne ?
Notre Bretagne ?
- Je me demande si Lorient n'était pas trop petit pour moi. Bien sûr, les mâts des bateaux manquent un peu, mais pour le reste!
- Dans les bars bondés et enfumés, parfumés au houblon irlandais et à la sueur bretonne, les vrais et les faux marins auraient laissé échapper des Hooo! Et des Gast!
- Tu as laissé passer ta chance, pêcheur breton.
- Un reste de catholicisme bas-breton....
- On collait même un BZH sur le coffre pour garantir la pureté de l'origine.
Éditions : Flammarion (2005).