KUNDERA Milan / La plaisanterie.
La plaisanterie.
Milan KUNDERA.
Note : 5 / 5.
Retour en Moravie.
Cette édition est présentée comme entièrement revisitée par Claude Courtot et l’auteur et est considérée comme la version définitive.
Ce roman, le premier de Milan Kundera, a été édité pour la première fois en 1967. Il est, je pense, nécessaire de se souvenir du contexte politique de l’époque, après la seconde guerre mondiale. Un régime communiste pur et dur règne d’une main de maître sur le pays.
Roman en sept parties, ayant toutes pour titres un ou plusieurs prénoms.
Première partie : Ludvik. Deuxième partie : Helena. Troisième partie : Ludvik. Quatrième partie : Jaroslav. Cinquième partie : Ludvik. Sixième partie : Kostka. Septième et dernière partie : Ludvik, Helena, Jaroslav.
Ludvik est de retour dans sa ville natale, il a un but bien précis, un rendez-vous amoureux. L’hôtel où il doit résider lui semblant peu propice à ce rendez-vous, il se fait prêter l’appartement d’un ami.
Il se remémore sa vie, des événements qui ont bouleversé celle-ci, en particulier une carte postale envoyée à une dénommée Marteka, jeune femme complètement dénuée d’humour et cette petite phrase qu’il pensait anodine :
- Alors, j’achetais une carte postale et (pour la blesser, la choquer, la dérouter) j’écrivis :
L’optimisme est l’opium du peuple ! L’Esprit saint pue la connerie. Vive Trotski ! Ludvik.
Alors les tenants de la pensée unique se déchaînent contre lui, taxé d’individualisme, il sera chassé du parti communiste, perdra son travail, et fera de la prison.
Durant cette période, il connaîtra et tombera amoureux d’une jeune fille prénommée Lucie. Amour tout à fait platonique, elle se refusera à lui et disparaîtra un beau jour. Nous connaîtrons son histoire plus tard.
Nous suivrons la vie de cet homme sur plus de quatre-cent soixante dix pages dans la version de poche.
Le personnage principal dont nous suivons l’existence est Ludvik Jahn, qui semble l’exemple type de l’homme dont la carrière est brisée à la suite d’une phrase qu’il considère lui-même comme une plaisanterie.
Beaucoup de personnages secondaires, en particulier de nombreuses femmes.
Un très grand livre, très bien écrit, qui m’a personnellement beaucoup touché, ayant dans ma jeunesse passé quelque jours en Tchécoslovaquie après l’invasion russe de 1968 et ayant côtoyé des gens absolument charmants.
Extraits :
-Le matelas se creusant sous mon poids, j’y était allongé comme dans un hamac ou une tombe étroite : il n’était pas possible d’imaginer que quelqu’un partagea ce lit avec moi.
- J’ai l’impression que sa surprise était presque heureuse et la spontanéité de son accueil me fit plaisir.
- Assurément, l’humour Marketa, ça n’allait guère ensemble, et moins encore avec l’esprit du temps.
- Mais qui étais-je réellement ? Force m’est de le redire : J’étais celui qui avais plusieurs visages.
- La conscience de ma propre misère ne me réconcilie nullement avec la misère de mes pareils.
- Au XVIIe et au XVIIIe siècle, le peuple tchèque, pour ainsi dire, cessa d’exister. Le XIXe vit, en fait sa seconde naissance. Dans le cercle des anciennes nations européennes, c’était un enfant.
- Comment lui expliquer qu’il incarne ce mal ? Comment lui expliquer que j’ai besoin de le haïr ?
- La vie entière a toujours été surpeuplée d’ombres, et le présent y tenait une place probablement assez peu digne.
Éditions : Gallimard (1985) pour cette édition. Folio pour la version poche.
Titre original : Zert. (1967).
Traduit du tchécoslovaque par Marcel Aymonin.
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Risibles amours.
L’ignorance.