THOMPSON Jim / Les alcooliques suivi de L'indice publicitaire.
Les alcooliques.
Jim THOMPSON.
Note : 3 / 5
Mise en bière !
Je poursuis cahin-caha la découverte des romans de Jim Thompson. Celui-ci date de 1953, période prolifique dans la carrière de l’auteur. Contrairement à d’autres titres, c’est ma première lecture de cette œuvre. Dans son livre « Coucher avec le diable. Jim Thompson», Michael McCauley dit sans ménagement de ce titre :
- À coup sûr le plus mauvais des romans de Jim Thompson.
Me voilà prévenu !
Suivra une courte chronique d’une nouvelle de l’auteur « L’indice publicitaire ».
Nous sommes à El Healtho, maison cure contre l’alcoolisme pour clients fortunés. Elle est dirigée par le Docteur Pasteur Semelweiss Murphy abrégé en Peter S. Murphy.
Lequel docteur Murphy doit trouver avant la fin de la journée 15000 dollars sinon c’est l’inéluctable fermeture…
Il y a bien une solution, la chambre 4, lieu des cas de forces majeures, un rejeton pourri de fric, alcoolique au dernier degré et devenu amorphe après une lobotomisation. La solution : qu’il meure et que Murphy donne le permis d’inhumer. Le chèque est là à portée de main.
Alors nous le suivons durant cette journée cruciale avec cette angoissante épée de Damoclès sur sa tête.
Et les moments de travail du docteur ne sont pas de longs fleuves tranquilles car ses pensionnaires ne sont pas de tout repos. Ils n’ont qu’une obsession trouver de quoi calmer leurs propres démons, boire encore et toujours.
Peu de personnages dans ce livre, mais des gratinés, cuits et recuits dans l’alcool pour certains, avec en chef de rang le Docteur Murphy. Mélange un peu bizarre de mollesse et de dureté, menant son affaire avec des méthodes peu orthodoxes, procurant des boissons alcoolisées à ses malades. Il peut être très dur, voire violent comme avec l’infirmière Miss Lucretia Baker, elle-même un peu sadique avec les patients !
Le personnel de couleur de l’établissement, deux infirmiers et une cuisinière, tous un peu bizarre par moments.
Mais la palme des gens étranges revient aux clients, fieffés pochtrons ! Le Général qui écrit un livre entre deux rasades d’alcool, les deux frères Holcombe, magnats de l’édition mais que ne siègent plus nulle part et reçoivent leurs gros chèques à intervalles réguliers, Bernie Edmonds, ancien prix Pulitzer, le jeune Jeff Sloane publicitaire qui jure ses grands dieux qu’il n’a pas de problème avec la boisson.
Une femme, Susan Kenfeld, actrice bien déboussolée, qui est enceinte, mais ne sait ni de qui ni depuis quand ? Donc elle veut avorter, Murphy s’y oppose.
Le docteur Perthborg vient vers la fin porter le chèque tant attendu !
Ce roman rappelle dans le style d’écriture les premières publications de Jim Thompson, roman avec une écriture classique donc d’une lecture que l’on pourrait qualifier d’aisée. Cela ressemble à une tentative de toucher un public plus large, loin de sa noirceur habituelle.
On peut de ce point de vue considérer effectivement que ce roman est le plus mauvais, mais étrangement le plus facile à lire !
Ce n’est pas du grand Jim Thompson qui semble faire une apparition en fin de récit sous les traits d’un écrivain alcoolique !
Extraits :
- Une centaine de millions d'années de vie... et pour quel résultat ? Eh bien, c'était clair, non ? Un tas de merde.
- Si on travaille dans des endroits comme celui-ci, il n'y a que deux raisons : par altruisme d'abord, parce que, comme vous, on veut vraiment aider les alcooliques...
- Et puis, comme l'avait fait remarquer un personnage haut placé, le pauvre bougre se débrouillait déjà bien assez comme ça pour se saouler. Avec plus d'argent, il risquait de se tuer à boire sans retenue.
- L'existence du Général était un pur défi à toutes les lois connues de la science médicale ; son existence et celle, d'ailleurs, presque tous les autres clients d'El Healtho.
- Elle ouvrit à la volée les portes fenêtres de sa chambre et se planta, nue, dans la lumière grise et froide de l'aube, buvant l'air chargé d'odeurs fortes du Pacifique.
- Et c'est bien dommage, une tragédie, en somme ; mais, bon, la vie, Dieu en est témoin, regorgent de tragédies.
- C'était trop. Tout cela en une seule femme–tout ça pour un mètre cinquante et tout juste cinquante kilos–cela aurait dû être interdit.
- Et tout cela, surtout pas ce qui leur manquait un intérêt dans la vie. Et je ne savais comment y remédier. J'avais en main tous les éléments et j'étais trop bête pour savoir les assembler.
Éditions : Rivages / Noir (1988)
Titre original : The Alcoolics (1953).
L’indice publicitaire
Jim THOMPSON.
Tout petit livre de 45 pages qui complétera très bien ma courte chronique et mon avis sur « Les alcooliques ».
Court texte tiré du magazine « True detective », il bénéficie d’une traduction illustrée chez « Mille et une nuits » dans la collection « 10 petits noirs ». Un roman noir classique, un crime dans un hôtel, la victime, un des hommes les plus riches de la région n’étant pas pour cela un personnage recommandable.
Plein de fausses pistes. Une lampe de chevet comme arme du crime, un assassin ingénieux mais démasqué par le narrateur, sorte d’inspecteur Columbo avant la lettre !
Quelques illustrations de Marion Bataille et une liste d'ouvrages et de notes biographiques complètent l'ouvrage.
Extraits :
– « Ce qui me tracassait, depuis le début, reprit Ike Carter comme s'il pensait, pourquoi diable un type comme Trumbull ne s'était pas méfié en voyant l'assassin venir à lui, une lampe à la main ».
– « il méritait qu'on le supprime. Il m'a tout volé, jusqu'au dernier cent. Et ils possédaient des millions de dollars ».
Editions : Mille et une nuits. (1964)
Titre originale : Case of the Catalogue Clue. (1948)