BASSOFF Jon / Les incurables.
Les incurables.
Jon BASSOFF.
Note : 5 / 5.
Plus on est de fous… moins on rit !
Jeune auteur américain que je découvre avec ce titre, son second traduit en français après « Corrosion » chez le même éditeur.
Ce roman raconte l’histoire romancée du docteur Walter Freeman, personnage très controversé, inventeur de la « Lobotomie transorbitale » qu’il pratiquait avec un pic à glace et un marteau ! Bonjour les dégâts !
Nous sommes en 1953, le docteur Freeman passe une journée ordinaire, une opération sur un jeune homme, Edgar Ruiz, celui-ci coupable de deux meurtres est reconnu fou. L’intervention qui sera pratiquée est une lobotomisation transorbitale, grande spécialité du docteur Freeman. Sa journée terminée, le praticien rentre chez lui. Un chez-lui qui ressemble plus à un taudis qu’à un appartement. Son épouse, négligée et ivre, est éveillée et vindicative. Depuis la mort de leur fils, victime d’une chute pendant une promenade en montagne avec son père, celle-ci le rend responsable de ce décès.
Le lendemain, Freeman est licencié de l’hôpital psychiatrique où il exerce, il décide de tout quitter emmenant avec lui Edgar Ruiz, son dernier patient.
Nous les retrouvons deux ans plus tard, dans une foire où le médecin a un stand, mais il n’est pas le seul sur cet espèce de champ de foire. Il a des voisins pour le moins singuliers. Un homme, prêcheur itinérant, est persuadé que son fils Durango est le Messie, sauf qu’il ne guérit absolument rien, ni personne.
Ce jeune garçon croise une diablesse Scent, jeune prostituée vivant dans la misère avec Baby sa mère. Scent pense qu’elle cache une grosse somme d’argent, qu’elle garde en prévision du retour de son mari chéri. Scent aimerait bien en voir un peu la couleur. Dans l’exercice de sa profession, elle tue un homme, qui n’est pas le premier d’ailleurs. Sauf que dans ce cas précis ce client a des frères qui ne sont pas des enfants de cœur mais plutôt des enfants de salauds. Et qui crient vengeance !
Freeman lui continue son petit bonhomme de chemin, soignant au pic à glace et au marteau… pas toujours avec succès, on s’en doute !
Et la liste des décès s’allonge…
Pour les personnages, on pense à « Freaks », galerie de monstres, dur de trouver un adulte sympathique, seul Durango est un léger rayon de soleil dans cet univers très sombre, de médecins fous, de charlatans, de paysans dégénérés, dont l’un a comme livre de chevet Kierkegaard !
Un des romans les plus noirs que j’ai lu dans ma longue carrière de lecteur !
Du Jim Thompson puissance deux !
Une découverte.
Extraits :
- Ce que nous avons décidé, Walter, est que vous ne serez plus habilité à pratiquer la lobotomie, pas dans notre hôpital.
- Bon, un de mes copains raconte que tu baises comme un poney, dit-il. (Elle grinça des dents, ne dit pas un mot.) Hé ben, allez. C'est le moment de le prouver.
- Le soleil était avachi dans un ciel tout brûlé.
- Elle parcourut les titres du journal du jour et trouva un article sur le gros type et sa mort sordide, mais ne prit pas la peine de le lire.
- Le truc, Scent, c'est que ce type avait aussi des frangins. Trois frangins. De bons gros fils de pûtes. Il t'étranglerait un type aussi facilement qu'ils disent bonjour.
- Le Docteur a sauvé des milliers de gens, en fait, je me disais que, peut-être, il pourrait aussi sauver mon père.
- Au troisième jour de prêche, l'intérêt pour la lobotomie allait croissant. Au cinquième jour, des files commencèrent à se former devant le motel. Des enfants inquiets pour leurs parents névrosés. Des parents inquiets pour leurs enfants turbulents. Des épouses se plaignant de maris infidèles. Des maris se plaignant des femmes ingrates. Les dépressifs, les angoissés, les violents. Et les communistes, les communistes, les communistes !
- Et la terre continuait de mourir.
Éditions : Gallmeister (2018)
Titre original : The Incurables (2015)
Traduit de l’américain par Anatole Pons.