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Littérature d'Irlande,de Bretagne et aussi d'ailleurs
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25 septembre 2011

ASTRUD Michèle / Vue sur la mer, rouge.

001016209
Vue sur la mer, rouge.
Michèle ASTRUD.

Note : 4 / 5.
L'art de la fugue.
Je rencontre Michèle Astrud depuis plusieurs années maintenant, à Carhaix et à Maurepas dans le cadre des salons littéraires, lieux de rendez-vous des blogueuses bretonnes (avec une pièce rapportée, moi !). J'avais bien aimé « Amitiés », mais un peu moins « J'ai rêvé que j'étais un garçon ». Voyons ce que sera la troisième expérience !
Une femme, jeune, presque encore une adolescente, fuit un hôtel de luxe, laissant derrière elle le cadavre d'un homme dont elle a vidé les poches....elle prend un train de nuit...vers une nouvelle vie, une nouvelle proie ?
Parfois elle téléphone à sa mère, qui lui parle de son père, sa sœur, son frère, sa famille qu'elle a fui un soir. Elle se remémore la dispute ; son frère, recalé à un examen, la prend à partie l'accusant de cet échec, lui reprochant un récent retour, qui semble t-il a perturbé la tranquillité du foyer. Tout le monde semble lui donner raison, alors elle part, gagne la gare et une station balnéaire déserte vue la saison.
Elle trouve très facilement un travail de serveuse dont sa plastique ne déplait pas au patron....
Elle raconte son histoire somme toute banale, des difficultés scolaires, son quasi-abandon des études sauf mathématiques, sa solitude à l'école comme à la maison, un conseil de discipline mal vécu par sa famille.
Et la fugue, puis une autre....elle donne des nouvelles, mais jamais son adresse, elle vit....travaille....cultive son secret....Plus de dix ans passent, mais un jour sa mère lui apprend la nouvelle ; son frère Antoine a disparu...pourrait-elle les aider à le retrouver ?
Michèle, qui est la narratrice de ce livre, est un être complexe, élève sans problèmes pendant des années, tout change, elle devient indisciplinée, arrogante, mal dans sa peau. Sa première fugue se fera avec un motard, chose que son frère lui reprochera comme excuse à son examen manqué. Sa mère, personnage aux deux facettes, effacée au premier abord, besogneuse mais c'est elle qui dirige son monde, chose que lui a abandonné son mari. Son frère Antoine et sa sœur Jeanne sont jumeaux, donc très soudés ; travailleurs ils réussiront dans la vie. Associés dans un cabinet dentaire, bien marié chacun de leur côté, ils sont le symbole de la réussite familiale. Mais la disparition d'Antoine brise cette image idyllique...et dix ans plus tard le drame ressurgit ! Mais est-ce réellement la même fugue ? Trop de choses séparent le départ d'une adolescente mal dans sa peau et celle d'un homme plutôt favorisé par la vie.
C'est très bien écrit, descriptif mais pas trop, en particulier les paysages marins les jours de marées d'équinoxe sont en particulier très réussis.
De par sa profession l'auteur connait bien les problèmes des adolescentes, ce qui est particulièrement sensible dans la première partie du récit. Un peu comme dans « Amitiés » il y a sur la fin un côté un peu fantastique dans un endroit retiré, étrange pour une rencontre. Le choix des décors, trains, gare déserte, station balnéaire hors saison, bungalow isolé dans un paysage recouvert de givre, accentue le sentiment de solitude de Michèle et l'oppression qu'elle ressentait en famille. La solitude n'est-elle pas la dernière des libertés ?
Un bon roman plus proche de mes aspirations littéraires que « J'ai rêvé que j'étais un garçon » par exemple.
Extraits :
- Au jour le jour, la vie au présent, sans avenir. Les cendres se mélangent au sable, poussière grise et calcinée.
- La vision de la plage s'imprime dans le globe de mes yeux clos, teintée de pourpre.
- C'est une marée d'équinoxe, un vrai soir de tempête. Derrière moi, les remparts de la ville sur lesquels je m'appuie. Devant, l'océan s'agite, bouillonne, déploie une armée d'écumes.
- Je tressaille à chaque fois que j'entends ces mots : ton père, ton frères et ta sœur, qu'elle prononce pourtant à chacune de nos conversations. Comme un rituel, une gourmandise, qu' elle n'oublie jamais.
- Heureusement, ils n'ont pas encore d'enfants.
- Le patron du bar m'observe, me détaille, me soupèse. Transpercé par son regard goguenard, la veste rose fuchsia, ultra ajusté sur mon buste, en épais coton mêlé d'élasthane n' a pas plus d'épaisseur qu'un infime voile de soie.
- Le regard bienveillant du principal se détourna de mon visage et je me sentis de nouveau abandonnée, et glacée. Mon père avait déjà quitté la salle et attendait dehors en arpentant le couloir.
- C'est étrange, cette nuit rouge vous ne trouvez pas ? murmure-il. On dirait que la plage est couverte de sang, de débris, de corps suppliciés, déchiquetés. Comme après les batailles j'imagine.
- Mon poing se contracte. Je frappe le verre qui se brise. L'image tombée gît, face contre terre. De ma main blessée, recroquevillée, un filet de sang coule qui tache le papier glacé.
- Dès le matin, la querelle se rallumait dans la maison familiale. La hache de guerre n'était jamais enterrée.
- Nous passions nos journées à nous détester.
- Tu savais déjà te battre avant de partir.
C'était bien mon seul talent, c'est ce que tu veux dire ?
Éditions : Diabase (2011).
Autre chronique de Michèle Astrud .
Amitiés.
J'ai rêvé que j'étais un garçon.

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Commentaires
E
Bonjour Clara.<br /> J'ai bien aimé ce titre plus sombre. Quels titres de Michèle Astrud as-tu lu ?<br /> Bises et à bientôt à Carhaix. <br /> Yvon
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E
Bonjour Sylire.<br /> On est prié de déposer Yvon, la pièce rapportée, où on l'a trouvé.....quelque part dans les allées du salon....et de le récupérer l'année prochaine.<br /> Bises et à bientôt à Carhaix...Déjà un an...<br /> Yvon
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C
Tu me donnes envie de relire cette auteure !
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S
Une pièce rapportée ? tiens donc...:-)
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