SCOUARNEC René / Histoires de Houat.
René
SCOUARNEC.
Histoires
de Houat.
Note
: 4,5 / 5.
Auprès
de mon île......
Ce
livre a été entièrement conçu par la petite fille de l'auteur
d’après un manuscrit de celui-ci. De
la rédaction à l'édition, avec tout ce que cela suppose de
recherches (archives personnelles, établir des dates précises de la
biographie familiale), de corrections et aussi de suppressions de
notes qui ne présentaient pas un grand intérêt pour le lecteur.
Il
nous raconte la vie d'un homme et son parcours tout au long du siècle
dernier et sur les mers du monde. Avec une île, Houat, pour point
d'ancrage.
René
Scouarnec naît au Havre le 7 octobre 1911. Son père était né à
Houat et sa mère à Plouharnel dans le Morbihan. Il arrive que des
pêcheurs se marient avec des femmes du continent. L'exemple le plus
célèbre est bien évidement Peig Sayers, née à Dún Chaoin,
(Comté de Kerry) ; elle fut la plus grande ambassadrice de la
littérature des îles Blaskett. L'auteur signale que ce n'est,
malgré tout, pas très fréquent. La
vie d'antan, avec en plus la particularité d'être « îlien »,
avec ses contraintes, mais également une très grande fierté. En
1924, la famille de René revient s'installer à Houat qu'il avait dû
quitter faute de travail (Le Havre est une ville où au moins un
membre de beaucoup de familles bretonnes a travaillé), et l'auteur
nous décrit le lieu et son quotidien qui, pour nous, est plein de
surprises. On apprend ainsi que l'île avait trois ports et
quatre forts pour se prémunir des nombreuses tentatives
d'invasions anglaises et hollandaises, ce qui peut paraître
surprenant! Cela ne s'invente pas : un de ces forts fut vendu à un
monsieur Fortin ! L'eau
douce ne manquait pas (du moins à cette époque mais la situation
s'est inversée, à partir des années
1960 avec la montée du tourisme) : il y avait en effet 4 fontaines
(pour la consommation) et deux puits dont l'eau était plutôt pour
les travaux ménagers. Ici,
comme souvent en Bretagne, les filles allaient à l'école religieuse
et les garçons à l'école publique. Le problème de la solitude des
gens du continent est d'ailleurs évoqué en parlant de l'éducation,
l'institutrice devient dépressive et un instituteur se pend ! Une
autre coutume de l'île était une sorte d'impôt qui ressemble à
des travaux d’intérêt commun qui consistaient en trois jours de
travail au bénéfice de la commune, qui fut remplacé par une taxe
d'habitation, et pas au bénéfice des habitants !
On
trouve beaucoup de choses surprenantes dans ce récit, sur la
prépondérance de la religion et le pouvoir des recteurs, on
s'aperçoit des similitudes entres les îles du monde entier pauvres
en arbres, avec l'usage de la bouse de vache séchée comme
combustible. On apprend que l'auteur qui travaille en élevant des
moutons et des poules est devenu par la force des choses boucher,
entre autre, mais la vie des îliens est dure et le travail rare
quand la pêche décline. Alors il ne reste, comme pour beaucoup
d'autres, que l'engagement dans « La Royale »......
Dans
ce que l'on pourrait appeler la seconde partie du livre, nous suivons
la vie de l'auteur et ses pérégrinations de marin d'état, et
également la marche du siècle. Beaucoup de déplacements étant
dictés par l'Histoire du Monde en particulier pendant la Guerre de
1939-1945. Et on rentre alors de plain pied dans ce que l'on pourrait
appeler l'époque actuelle et le modernisme. On retrouve donc le
parcours relativement habituel de beaucoup de marins bretons,
sillonnant les mers lointaines au départ de Lorient, Brest ou
Toulon.
Les
personnages de ce livre sont la famille au sens large, le « Clann »,
ce mot gaélique qui signifie la filiation étendue, mais sans le
côté sectaire qui est donné à ce terme, les cousins (à la mode
de Bretagne) sont très proches et sont souvent élevés ensemble,
surtout sur une île.
Ce
livre en plus d'un texte à l'écriture simple (c'est ce que j'aime
dans ce genre de documents), donc facile d'accès, est très bien
documenté. Et aussi abondamment illustré de cartes postales ou de
photos de famille, souvent en sépia ou noir et blanc qui font
toujours mon admiration !
Extraits
:
-
Comme chez les marins, la femme s'occupait de toutes les affaires de
la famille et des enfants pendant que le mari était en mer.
-
À cette époque, le recteur de Houat régnait en maître sur la
conscience des Houatais !
-
Tous les hommes sur l'île étaient pêcheurs. Il n'y avait pas
d'ouvriers.
-
Une tante de mon père, la tante Reine, a vécu jusqu'à près de 100
ans sans jamais sortir de l'île.
-
Ce pot de baptême, que j'ai reçu de mon père, qui lui-même
l'avait reçu de ses parents, a une histoire qui date de la
révolution. Nous nous le transmettons depuis, d'aîné en aîné
avec son histoire.
-
Il fallait les comprendre, elles ne recevaient pas souvent la visite
de jeunes gens et nous étions très flattés.
-
Dans un pays comme Houat qui vivait en dehors du monde, il fallait
savoir tout faire.
-
Nous étions bretons tous les quatre, comme les trois quarts de
l'équipage.
Éditions
: Verdi, site ici.