D'HALLUIN Bruno / Jón l'Islandais.

Jón l'Islandais.
Bruno d'HALLUIN.
Note : 4 / 5 .
Saga du nord.
Curieusement, bien que né au bord de la mer, je
n'ai jamais été spécialement attiré par la littérature maritime. Je vais donc à
la lecture de ce livre tacher
de réparer une partie de cette lacune. Il semblerait que ce roman soit le
premier de ce navigateur un peu globe-trotter, ou globe-trotter
navigateur.
Comme le titre de l'ouvrage indique nous suivrons
les aventures de Jón Thorsteisson, d'Angleterre au
Portugal. En avant toute!
Nous sommes à Bristol, à la fin des années 1470,
Jón a été enlevé enfant sur les côtes islandaises, il a le
statut d'esclave dans une riche famille anglaise. Cela fait déjà onze ans qu'il
est en Angleterre, ses souvenirs familiaux et de son pays s'estompent, malgré
tous ses efforts. Mais il a au coeur le fait de rentrer pour essayer de revoir
sa mère.
Les années passent, il travaille chez un tanneur,
fait la connaissance de quelques marins, d'un compatriote, et profite d'une
occasion due à la tempête pour voler un bateau et repartir vers le nord, chez
lui.
Après un voyage plein d'aventures, de péripéties
diverses et de morts, il touche enfin les côtes islandaises, mais hélas, il
apprend que sa mère, toujours vivante, est partie vivre aux Açores. Il découvre
à cette occasion, qu'il est né au Groenland et non pas en Islande. Pourquoi ? Il
cherchera donc à découvrir l'histoire de sa famille et de son
pays....
Nous passons de famines en peste noire, de
voyages au long cours en vie monacale, nous faisons connaissance avec des moeurs
surprenantes, en particulier celles des autorités ecclésiastiques islandaises,
bien loin de l'abstinence catholique!!!!!!!
Les personnages dans ce genre de saga sont
évidemment très nombreux, Jón a une vie bien remplie,
aventurier humaniste et homme curieux, il nous sert de guide tout au long de
cette surprenante saga.
Un livre très prenant, on suit avec beaucoup
d’intérêt les péripéties de la vie de Jón, mais l'auteur ne
tombe pas dans le piège de la répétition ou du trop plein d'aventures, car
pendant de nombreuses années son existence est celle d'un homme de son époque,
parfois mouvementée, parfois solitaire sur une île ou dans une ferme isolée.
Contrairement à ce que l'on pourrait croire
toutes les îles ne sont pas paradisiaques. Les îles du Grand Nord font partie de
celles là! Certaines descriptions de la vie au Groenland ou en Islande font (et
c'est le moins que l'on puisse dire) froid dans le dos.
Ce livre est très intéressant, car nous
découvrons beaucoup de choses sur l'histoire des îles nordiques, ce qui a dû
nécessiter un énorme travail. Et ce roman n'est pas une épopée sanglante nourrie
par notre imaginaire sur les vikings, mais la vie d'un homme à la recherche de
ses propres racines.
J'ai trouvé des noms inconnus, les Norrois, les
Skraelings, le Vinland, le Markland, le Helluland, et aussi l'histoire
tourmentée de cette partie de l'Europe qu'il me semble nous connaissons
mal.
J'ai redécouvert aussi l'existence de Jehan
Coëtanlem, capitaine de Morlaix qui donnait du fil à retordre aux navires
anglais.
Extraits :
- De nouveau, Jón fut ébloui
par le vert.
- Tous les soirs, il se parlait à voix basse de
l'Islande. Pour ne pas oublier son pays, pour ne pas oublier sa
langue.
- Le garçon n'oubliait pas le serment fait à sa
mère, et faute de savoir comment le respecter, il l'avait peu à peu
refoulé.
- Que ces gens-là fussent chrétiens étaient
ahurissant.
- Il pensait à Alice, à l'Islande. La jeune fille
comme l'île lointaine lui parurent inaccessibles.
- Le maire annonça que le chef des assaillants
était un Breton de Morlaix, un maudit pirate du nom de Jehan Coetanlem, déjà
connu pour écumer la Manche et y avoir attaqué récemment des bâtiments
anglais.
- L'Irlandais lui fit un sourire complice. Il
conseilla d'éviter Dublin, contrôlé par les Anglais.
- Mais il n'est pas du tout apprécié des
Islandais : on n'aime pas être gouverné par un étranger, et plusieurs fermiers
l'ont accusé de viols et de vols.
- Afin de marquer l'événement, on avait mangé de
la tête de mouton fumé et des testicules de bélier suries.
- Jón était surpris par le
climat de violence qui régnait dans son pays.
- Jón put mesurer la
condescendance des Danois.
- Il s'apprêtait à citer l'exemplaire, Séra
Benedickt de Skard, qui certes entretenait une relation charnelle avec sa bonne
et pêchait par gourmandise, mais était par ailleurs
irréprochable.
- Heureusement, nous autres islandais avons su
garder la langue d'origine des peuples du Nord, et sauvegarder les vieilles
connaissances.
- Le moine acquiesça. Il considérait l'Islande
comme le pays ayant développé la littérature la plus
évoluée.
- Malheureusement, l'asservissement aux
puissances étrangères avait contribué à faire oublier l'Islande des lettrés du
reste de la chrétienté.
- « J'ai constaté aussi que l'esprit viking,
conquérants et voyageurs, était bien mort dans l'Islande soumise aux
Danois ».
Éditions : Gaïa (2010)