GUDMUNDSSON Eimar Már : Les anges de l'univers
Les Anges de l'univers.
Eimar Már GUDMUNDSSON.
Note : 4 / 5.
O.T.A.N. en emporte le vent!
Écrivain né à Reyjavik en 1954, il a publié des recueils de poésie, puis des romans.
« Les Anges de l'univers » a obtenu le Grand prix de la littérature nordique. C'est, avec pas mal de retard, ma dernière contribution à l'année de l'Islande de la médiathèque de Lorient.
Ce roman se compose de deux parties « Les anges de l'univers » et « Ombres errantes », titres très explicites pour décrire la lente déchéance du narrateur.
Páll ne peut oublier sa date de naissance, en effet, ce jour là l'Islande entre dans l'O.T.A.N, ce qui n'est pas du goût de tout le monde semble t-il ! A la suite d'un embouteillage, son père n'était pas présent! Il nous raconte sa vie du berceau à l'asile psychiatrique de Kleppur. Certains souvenirs sont plus marquants que d'autres, un beau et mystérieux voilier apparaît, avec pour des enfants son lot de questions! Une voisine un peu grassouillette qu'il persuade qu'il entend son cœur battre quand il pose son oreille sur son sexe nu! L'alcool et les quatre cents coups avec les copains, embauchés pour vendre des fouets factices, pas commerçants pour deux sous(?). Leur part est de deux couronnes par vente, ils les cèdent donc à deux couronnes! La voisine n'est pas des plus réjouies. Un séjour au bord de la mer, chez un vieil excentrique avec qui il fera le coup de feu contre un bateau islandais, qu'il avait pris pour navire de guerre russe. Après une altercation avec son père, il décide de partir en Amérique avec pour seul bagage un transistor.
La seconde partie est beaucoup plus sombre, car elle concerne principalement son internement. Páll déroule pour nous sa vie chaotique, nous sentons en lui un certain goût pour la peinture, comme le père d'un de ses amis. Mais hélas.....Son père a eu certains problèmes avec la famille de son épouse, on le voyait souvent au bal, contant fleurette de çi, de là, ne saluant personne. Une explication franche permis de se rendre compte de la méprise, ce n'était pas son père, mais son frère jumeau! Sa mère est un personnage plutôt discret, ses frères et sœurs sont souvent apeurés lors de ces séjours à la maison. Ses amis de jeunesse et les jeunes filles rencontrées, tout cela nous rappelle qu'il fut un garçon comme les autres, un grand chagrin d'amour et des problèmes de santé ont malheureusement fait qu'il est devenu un être quasiment obèse bourré de médicaments!
Ses voisins, comme Thór qui se fit sauter un oeil un jour de chasse, Eyvindur, chauffeur de car, tueur de chats ; voulant changer de vie, il achètera un chalutier, fera faillite et sombrera dans l'alcoolisme. On croise aussi Ragnar un de ses oncles, communiste, contestataire, grand parleur devant l'éternel. Mais il reconnaît qu'il ne ment jamais, mais enjolive toujours! Une galerie de personnages plus extravagants les uns que les autres, par exemple Pétur, qui rentre chez lui en plein milieu d'une promenade, car il a verrouillé sa porte, et les fantômes qui habitent chez lui ne pourront pas sortir! L'Empereur des aurores boréales, qui peint plus vite que son ombre, tout du sol au plafond. Il travaille à la confection d'une statue, la sienne Mais dit-il « Je me suis fait trop gros » . Il roule en carrosse noir tiré par trois chevaux! Le bachelier dément que la maladie emportera.
Que de destins tragiques dans ce livre et surtout dans cet hôpital!
Une écriture très poétique, un ton un peu doux-amer, la construction de ce livre fait plus penser à une suite de saynètes qu'à un véritable roman. A lire pour l'originalité du sujet, même si celui-ci est plutôt austère et amène le lecteur à des conclusions guères réjouissantes. Quelques lignes de poésie sont posées par-ci, par-là dans ce livre, mais la mort est très présente également, les suicides et les pêcheurs naufragés sont la plupart du temps les causes de ces décès.
Extraits :
- ... et quand je serai à mon tour tout maculé de peinture, les doigts verts et bleus, convaincus d'être la réincarnation de Vincent Van Gogh.
J'ai mal à l'oreille.
- Ragnar est communiste et ne s'en cache pas : « soit on est communiste, soit on est con. »
- C'était longtemps avant les jours de la graisse médicamenteuse, avant les jours du café à la louche et de la toux tabagique.
- Marilyn, grande infirmière de la solitude ; l'éternel féminin en communication téléphonique directe avec l'éternité.
- Je trouvais qu'il avait changé, mais ça ne veut rien dire parce que, moi, j'avais déjà basculé.
- Plus tard, quand je mourus, c'est lui qui officia à mon enterrement et pour autant que je sache, il s'en est bien tiré.
- Maintenant j'écris une histoire.
J'écris ma propre oeuvre.
- En fait, le temps est toujours compté, même s'il s'avère qu'il y en a toujours à revendre.
- L'aliéné dit qu'il est mort et enterré. Tous les dimanches, il va au cimetière mettre des fleurs sur sa propre tombe...
- Non, cette tombe n'est pas assez profonde pour contenir nos sentiments à tous.
- Quand les montagnes enlèvent leurs blouses blanches, c'est l'heure de la visite des oiseaux.
Éditions : Flammarion(1998)
Titre original : Englar Alheimsins (1993)