ÉMERY Alain/ Canaille & Compagnie
En janvier, certains magasins font « La quinzaine du blanc »; en cette fin du mois de mars, je vais faire « La semaine du noir ». De la nouvelle noire plus précisément, 6 recueils d'auteurs qui pour l'instant ne sont pas encore sur ce blog à titre personnel, certains figurent dans des ouvrages collectifs. Ils apparaîtront par ordre alphabétique. Ce sera une petite semaine, je me reposerai dimanche, et vous aussi sûrement!
A suivre,
Yvon.
Canaille & Compagnie.
Alain ÉMERY.
Entre gens du même bord.....
Note : 4 / 5.
De cet auteur, né à Saint-Brieuc, je ne connaissais qu'un seul texte : « Chez moi, » paru dans le recueil « En Bretagne ici et là. ». J'avais beaucoup aimé une phase : « Que voulez-vous, je suis d'Erquy...C'est dans la viande. Je ne peux rien contre ça ». Un de ses romans se nomme d'ailleurs « Erquy sous la cendre ». Ce recueil de 19 nouvelles est paru en 2005.
Le jeu voilà l'ennemi, un homme « entre dans l'ombre », sur lui il a un peu d'argent, il est sûr que pour une fois la chance va lui sourire. D'ailleurs chez lui, il a eu un bon présage.....
« Tolérance zéro » notre futur n'est pas très gai, cette nouvelle est là pour le rappeler. Un homme sûr de ses principes et des lois qui régissent le monde est confronté à un dilemme. Il aime une pauvre, qu'est-ce qui est pour lui le plus important la raison ou l'amour ?
« Passer au travers » tout homme aura le droit à son quart d'heure de gloire disait AndyWarhol. Le problème est d'être considéré comme le symbole de la lâcheté. Pour le personnage principal de cette nouvelle la vie est devenue une parenthèse! Mais sans le vouloir, la société lui donne l'occasion de se venger.
« Grand sorcier » est à mon goût l'une des meilleures histoires de ce livre. Imaginez un homme, expert en produits dopants, sévissant dans toutes les disciplines sportives. Un jour, il prend un homme normal et à force de piqûres et de pilules le transforme en une espèce d'étalon, roi des rings. Mais les étalons ont également des besoins sexuels, et la femme du « Grand Sorcier » n'est pas insensible au charme surdimensionné du sportif. Alors, le roi de la dope se rappelle d'un cocktail maison, cocktail en intraveineuse.....
« L'ordre des choses » est immuable. Alors, quand on veut tricher cela peut se retourner contre l'instigateur de ce mauvais coup. C'est ce que découvre avec stupéfaction un homme d'affaires devant la maigre assistance qui s'est déplacée pour son enterrement. Simulé, l'enterrement !
« Safari » pas d'animaux tués dans ce safari photo, une seule cible Edwige, une belle bête en réalité. Mais dans le tableau de chasse il faut un mort!
« Le pactole » cela se mérite, c'est ce que pense Jean René Barmont, qui excelle dans son métier enfin le métier dont il se prévaut : chasseur d'héritage. Et ne croyez surtout pas que c'est la belle vie, ils font faire des sourires et des ronds de jambes. Il en passe des nuits au chevet de gens malades, bref une occupation à risque.
« La médaille », comme toutes les autres, elle a son revers. Mais on ne l'emmène pas dans son cercueil, alors pourquoi ne pas aller demander à la future veuve de lui donner cette fameuse médaille?
Des personnages souvent pris des des événements qui les dépassent, comme un enfant de 10 ans, dont le père se présente comme « Nono le roi des mécanos », et qui en plus bat son épouse. Mais quand on n'a que 10 ans....Une femme est horrifiée, un rasta attend chez son docteur, un chauffeur de taxi pense que sa vie ne sera plus la même après avoir transporté cette femme sublime. Il ne se trompe pas. Un sous-préfet qui découvre sa femme parmi les manifestants, une femme pensait pouvoir devenir Miss Monde, à bientôt 40 ans que lui reste-t-il ce rêve de jeunesse? Un notaire un peu aviné et soudain généreux, un postier un peu timbré, un bûcheron amoureux et un homme en colère, derrière chez lui dans son bois....Un garçon un peu simplet, qui dorlote son champion en vue d'une grande course, cela demande de l'attention et des soins. Même si la mère n'est pas d'accord.
Si comme moi on n'est pas trop gêné par la noirceur dans la littérature, ce recueil fait partie des très bons. L'écriture est très agréable (plus que certaines situations !) et la présentation très aérée, ce qui rend la lecture plus facile. En plus, et cela ne gâche rien, il y a beaucoup d'humour noir et désespéré dans beaucoup de ces histoires. Cela amène parfois un rire jaune évidemment.
Extraits :
- Il sait de quoi il parle, lui qui a vendu son rein gauche pour finir de payer sa voiture.
- Je crois que nous sommes tous programmés pour l'enfer. J'ai vécu le mien sans broncher.
- Déhydroépiandrostérone, erythropoïetine....À la seule évocation de ces liqueurs barbares, j'étais comme un poisson dans l'eau.
- Un virtuose des corticoïdes ! Le Mozart de la nandrolone ! Ces potions n'avaient aucun secret pour moi, et cette généreuse partition s'offrait le plus dévoué des chefs d'orchestre!
- Il représentait l'État. L'État, avec un grand E.
- Je crois pouvoir dire que je suis un monstre normal.
- Certains hommes murmurent à l'oreille des chevaux. Régis, lui, savait susurrer à l'oreille des gourdes.
- Il passait, auprès de son écurie, pour un être absolument exquis. Jamais ils ne les brusquaient.
- Je ne sais plus qui a dit que j'étais un médiocre en plein déclin.
- Aussi régulière que les flux et reflux des marées, l'inquisition poursuit son œuvre.
- Tu vois, Nanard, si tu ne fais rien à l'école, plus tard, tu seras comme eux.....
- Parce qu'il reste des cartouches qu'il y a encore de la place. Beaucoup de place.
- Elle mourut sans même s'en apercevoir.
Éditions : La Tour d'Oysel (2005)