LISPECTOR Clarice / Un souffle de vie.
Un souffle de vie.
Clarice LISPECTOR.
Note : 4 / 5.
"Écrite en agonie".
Comme le dit Olga Borelli, plus amie que secrétaire, cette oeuvre commencée en 1974 et terminée en 1977 peu avant sa mort, a été comme l'a dit Clarice, "écrite en agonie".
J'ai lu plusieurs oeuvres de Clarice Lispector avant de tenir ce blog, mais l'interrogation à chaque fois est la même, lisible ou illisible?
Un auteur s'invente un personnage "Angela Pralini" pour rompre sa solitude. Il tente de lui insuffler la vie en nous la présentant. Elle a trente-quatre ans et est née à Rio de Janeiro. Commence alors une longue suite de dialogues entre "L'auteur" et Angela. On y parle de musique et de chiffons aussi parfois, comme pour l'achat d'une robe pour Angela qui nous présente son chien "Ulysse". Les narrateurs s'attardent également sur la liberté et la folie. Le rêve et la réalité, l'incompréhension vis à vis des techniques modernes, sont également des motifs de réflexions. Un des thèmes récurrent de l'ouvrage est la difficulté d'écrire! Chose qu'évoque souvent l'auteur avec quelques phrases comme celles-ci :
- Une chronique, ce n'est pas de la littérature, c'est de la paralittérature.
- J'ai tellement honte d'écrire. Heureusement que je ne publie pas.
- Le petit succès de mes livres m'a rendu difficile l'art d'écrire.
Clarice Lispector se dédouble dans cette suite de conversations à bâtons rompus sur tout et rien. Elle parle d'elle, dans le personnage d'Angela, en disant qu'elle écrit des chroniques hebdomadaires dans un quotidien. En effet Clarice Lispector a tenu chaque samedi, d'août 1967 à décembre 1973, une chronique dans le "Jornal do Brasil". Ses textes sont rassemblés dans "La découverte du monde" dans la même maison d'éditions que le présent ouvrage. Se dotant de deux vies, espérait-elle avoir le droit à deux morts?
L'amour et la haine qui font partie de la vie, ainsi que Dieu et la religion car la mort est là aussi même très proche pour l'auteur.
L'écriture de Clarice Lispector est belle mais pleine de mystère et cet ouvrage est relativement facile à lire, même si par moment on ne sait pas bien où l'auteur veut en venir. Une oeuvre à classer dans la partie lisible de sa bibliographie.
Une femme très attachant, morte la veille de ses cinquante-sept ans. Née en Ukraine, elle sera le symbole de la littérature féminine brésilienne.
Merci au magazine "Les Inrockuptibles" d'avoir un jour mis une photo de cette dame que j'ai gardé précieusement et qui et c'est le plus important de m'avoir donné envie de découvrir son oeuvre.
Extraits:
- J'écris comme si cela devait permettre de sauver la vie de quelqu'un. Probablement ma propre vie.
- Écrire est une sorte de recherche de l'intime véracité de la vie.
- Est-ce à cause de ce rêve que j'ai inventé Angela. Pour être mon reflet?
- J'écris à minuit parce que je suis obscur. Angela écrit de jour parce qu'elle est presque toujours une joyeuse lumière.
- Je suis un écrivain empêtré et perdu. Écrire est difficile parce que cela frôle les limites de l'impossible.
- Pourquoi tuer ce qui vit? Je me sens assassine et coupable.
- Douleur? Joie? C'est simplement une question d'opinion.
- Pour écrire, j'ai besoin de ne pas perdre de vue ma faible capacité.
- Angela n'écrit pas elle gémit.
- A mon avis Dieu ne sait pas qu'il existe.
- Et la mort ne peut plus rien contre moi parce que JE N'AI PLUS PEUR.
Éditions : Des femmes.
Titre original: Um supro de vida. (1978)
Autre chronique de cet auteur :
Agua Viva.
Où étais tu pendant la nuit?