THOMPSON Jim / Nothing Man.
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Nothing Man.
Jim THOMPSON.
Note : 5 / 5.
Dommage de guerre.
Ce roman a déjà été traduit en 1966 dans une version raccourcie par Jacques Hall, sous le titre de « Monsieur Zéro ». Ici, il s’agit de la première version intégrale en français.
Je reprends ici, en partie, mon ancienne chronique.
Clinton Brown (Brownie) est un journaliste très apprécié du « Pacific City Courier ». Sa chronique « Les potins de Clinton Brown » est un franc succès. Durant la guerre par erreur lui et ses compagnons ont été envoyés dans un champ de mines. Il est le seul survivant mais à quel prix ! Depuis il noie sa solitude dans l’alcool. Dave Rendall, le rédacteur du journal, est l’homme responsable de la tragique méprise.
Ce jour-là, Clinton fait la connaissance de Deborah Chasen, une femme belle et très riche qui lui propose de partir avec lui… chose qu’il refuse !
Lem Stukey, chef de la police de l’endroit, lui annonce le retour de son épouse dont il veut divorcer. L’ayant quitté, elle s’est livrée à la prostitution. Elle loge dans un bungalow sur une île ; malgré le temps épouvantable il va la rejoindre. Elle le supplie de reprendre la vie commune. Clinton l’assomme, imbibe le drap de whisky, puis enflamme le tout. Quand Lem Stukey, qui doit gérer l’affaire de « L’assassin goguenard » (qui est devenu Le Tueur Ricanant), l’interroge, il lui démontre qu’il ne peut en aucun cas être coupable !
Mais sur sa lancée, il se lance dans une campagne de grand ménage de la ville, discours qui met Lem Stukey dans l’embarras.
Il apprend également qu’un de ses collègues de travail était sur l’île ce soir-là ! Il avait eu Madame Brown au téléphone et espérait une partie de jambes en l’air avec elle ! Il ferait un coupable tout désigné.
Durant les obsèques de son épouse, il retrouve la belle et richissime Deborah Chasen toujours folle amoureuse et sachant qu’il est désormais veuf s’offre sans pudeur. Elle sait aussi d’autres choses plus graves pour Brown, qui n’a plus qu’une option, la tuer !
Puis son chemin croise Constance Wakefield, qui aimerait éditer ses poèmes que son épouse lui avait remis il y a quelques temps. Mais un poème qu’il a écrit a été retrouvé dans la chambre où sa femme est décédée, et il avait pris soin d’en déposer un autre dans le sac de Deborah !
Et le cercle infernal commence. Clinton Brown est un homme brisé et on le serait à moins. Mais il a gardé toute sa tête et un esprit machiavélique, son seul désir délirant est de faire le vide autour de lui. Alors il met tout en œuvre pour y arriver. Personnage retord, il est dans le même registre que Nick Corey, le personnage du shérif dans « 1275 âmes » ou de Lou Ford de « L’assassin qui est en moi ».
Dave Randall est le seul à connaître l’infirmité de Brown. En effet celui-ci a divorcé dès son retour du front. Il subit les moqueries de Brown, et aussi la colère du propriétaire du journal. Et aussi la déplorable cuisine de Kay, son épouse. Beaucoup de choses pour un seul homme.
Lem Stukey connaît ses limites et celles de son pouvoir, cela ne l’empêche pas d’être perspicace.
Encore un excellent roman noir, qui pour moi ne dépareille pas dans la bibliographie de Jim Thompson mais qui me semble relativement méconnu. À signaler une fin extrêmement déroutante !
Le format n’est pas le même mais ce roman fait 333 pages contre 250 dans la précédente traduction.
Extraits tirés de la nouvelle traduction :
- Je pris l'air de Charles Boyer et elle rit de plus belle. Cette fois, il n'y avait plus rien de nerveux, juste quelque chose d'avide.
- Elle est arrivée par le bus de quatorze heures trente, Brownie. Un des gars l'a reconnue.
- Elle n'était pas mauvaise, ma femme. Elle était faible, rancunière et têtue ; elle avait fait de sa vie un enfer pour mieux pourrir la mienne.
- Les choses sont comme ça. À quoi bon lutter ?
- Cette affaire, nous n'allons pas pouvoir l'enterrer. Elle m'évoque celle du Dahlia Noir.
- On n’a pas la belle vie quand on est coincé dans une petite ville et marié à un reporter à moitié incompétent. On vieillit vite.
- Et elle était si merveilleusement naturelle et humaine. Ève avant la pomme, Circé prise d'un fou rire, la Pompadour loin des regards de la cour.
- Lovelace étant Lovelace, à moins d'y être obligé, on ne lui disait pas non.
- Une merveilleuse partenaire pour s'adonner à l'ancestral et honorable passe-temps du stationnement coquin.
- Stukey ne s'abaissait pas à faire des choses qui ne lui rapportaient rien.
- L'une de ces femmes verticales qui évoquent un tuyau de poêle, la chaleur en moins. Droite. Distante. Blême. Myope et asthmatique.
Éditions : Rivages / Noir (2021).
Titre original : The Nothing Man (1954)
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Julien Guérif.
Autres titres de cet auteur sur ce blog :
La cabane du métayer.
Deuil dans le coton.
Un meurtre et rien d’autre.
Le criminel.
Une combine en or.
Ici et maintenant.
Un chouette petit lot.
A deux pas du ciel.
Cent mètres de silence.
Avant l’orage.
Une jolie poupée.
1275 âmes.
Rage noire.
Les alcooliques
Les arnaqueurs.
Le lien conjugal.
Monsieur Zéro.
L’assassin qui est en moi.
Le démon dans ma peau.
Nuit de fureur.
Un nid de crotales.