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6 juillet 2020

MANCHETTE Jean-Patrick / Les yeux de la momie.

 

Les yeux de la momie

Les yeux de la momie.*
Jean-Patrick MANCHETTE.

Note :  5 / 5.
Silence… il regarde.
Je redécouvre Jean-Patrick Manchette après une longue interruption, sans cause réelle. Dans la série des « Chroniques », j’ai lu dernièrement, (enfin il n’y a pas très longtemps) un ouvrage regroupant ses chroniques sur le roman noir, sobrement intitulé 
« Chroniques ».
Je dois constater que je suis plus un littéraire qu’un cinéphile, mais l’un n’empêche pas l’autre ! Malgré tout la lecture de cet ouvrage a confirmé mes lacunes dans le 7ème art.

Ce volumineux livre commence par une préface de Gébé, puis lui succèdent « 57 notes sur le cinéma » et ensuite viennent ces chroniques cinématographiques qui commencent dans le numéro 456 du 9 août 1979.
Ces chroniques ont une personnalité propre, celle de son auteur, les premières lignes du livre donnent le ton :
- Je tiendrai ici, jusqu'à nouvel ordre, une chronique consacrée principalement au cinéma. Ça tombe assez mal parce que j'ai de l’aversion pour ce que le nouveau cinéma est devenu.
Mais ne nous laissons pas rebuter ; dans ce volumineux ouvrage, Manchette nous parlera de films qu’il a vus et parfois de ce qu’il n’a pas vu.
Tous les grands du cinéma mondial y passent, parfois à la moulinette, parfois avec quelques éloges (mais c’est plus rare !)
Même chose d’ailleurs pour les moins grands.
- Costa-Gavras filme
 avec capacité et conviction. Le résultat est, comme son nom l'indique, un bol de mastic.
Parfois, mais avec une ironie certaine, il passe la brosse à reluire :
- Mes chefs sont intelligents et bons. Tout le monde est intelligent et bon à Charlie hebdo, journal intelligent et bon ; mais surtout les chefs.
Il peut non sans humour se moquer de lui-même :
- Les spectateurs bovins (catégorie à laquelle je suis fier
d'appartenir) iront plutôt se taper l'évadé d'Alcatraz de Don Siegel, avec Clint Eastwood.
N
e pouvant pas parler en à peine deux pages de tous les films que j’ai vus et aimés, j’ai voulu connaître l’opinion de Manchettes à leurs sujets.
Prenons John Boorman, le jugement est sévère :
- Certainement John Boorman est un auteur et non un contremaître ; de film en film, c'est un propos homogène qu'il développe. Cependant il ne nous avait pas séduit jusqu'ici. Il nous avait plutôt agacé.
Ensuite, il met en parallèle deux films, l’un que l’on peut éviter : Zardoz et l’autre que j’aime bien : Délivrance, avec un détour par Excalibur.
Stanley Kubrick s’en sort un peu mieux :
-
 Kubrick, certes un grand cinéaste, dans un temps où la grandeur s'est retirée du cinéma, aime bien, notamment, poussée à l'extrême et au monumental, le film de genre…
Il parle également d’écrivains au sujet d’un film et il n’est pas tendre :
- Le mouvement beatnik a été quelque chose d'assez pauvre mais assez important. De même que, littéralement, Kerouac innove peu par rapport à Henry Miller, de même le trimard et la vie de bohème ne sont pas un style de vie nouveau.
Un peu de provoc :
- La Poste a beau être engorgée en début d'année, je suis étonné de n'avoir encore reçu aucune lettre d'injures, plus de huit jours après avoir fait imprimer : Altman est un pauvre débile.
Au sujet de Bertrand Tavernier : Pour le film Coup de torchon.
- L'adaptation faite par lui et Jean Aurenche du célèbre Jim Thompson 1275 âmes est pourtant sans esprit. La farce devient vulgarité, et on se croit vite dans une mauvaise pièce de boulevard.

Dans les objets de curiosités, une lettre d’Yves Montand sur la critique de Manchette au sujet du fil « Clair de femmes » publié dans le journal.
Deux index (la formule me paraît amusante) en fin d’ouvrages :
Index des films cités avec la particularité d’employer parfois les titres français ou les originaux.
Index sélectif des noms cités.
Donc il est très facile de faire des recherches pour un acteur, un réalisateur ou un film.
C’est impertinent, souvent hilarant, parfois horripilant, mais cela dépoussière les critiques cinématographiques.
C’est dans l’air du temps Jackie Berroyer est cité 10 fois, Kubrick 6 ! Bon, Hitchcock est cité lui 13 fois !
Un excellent livre de chevet pour les cinéphiles à l’esprit ouvert.
Autre qualité, je me suis rendu compte que le temps passant, je n’arrivais plus à donner une date à certains films.
Un peu à la manière de Flann O’Brien :
L'auteur tient à remercier les bières Guinness, Spaten et Gueuse Lambic, sans le précieux concours desquels il n'aurait pas pu exercer le métier de journaliste pendant presque deux ans (août 1979-juillet 1981).
Après cette lecture je n'écouterai plus «Le masque et la plume » consacré au cinéma le dimanche soir, sans repenser à ce livre.
Une dernière appréciation, une très belle couverture !
Extraits :
- Au moins aurais-je pu profiter de ma position pour dire un mot en faveur d'un jeune camarade qui est, comme on dit, « passé à la réalisation ». Son film se nomme Entrez vite, je mouille. J'ai eu comme un coup de fatigue.
- C'est Hitchcock mineur. Un Hitchcock mineur vaut mieux qu'à peu près tous.
- L'image est une idée. Du moins, l'image n'existe pas sans son idée.
- Enfin, à Ne tirez pas sur le dentiste, on ne s'emmerde pas, c'est toujours ça.- Les acteurs font plaisir à voir et valent le dérangement à eux seuls. Jane Fonda est belle et intelligente. Jack Lemmon est encore plus beau et intelligent. Cet homme admirable nous enchante toujours.
- Je ne suis pas vraiment qualifié pour rendre compte de La Luna de
Bertolucci. Cet homme m’ inspire à l’ordinaire un agacement tiède.
- Ajoutons que la bière Jeanlin est moins chère que la Gueuse Lambic, mais qu'elle est moins bonne. Passons maintenant à la rubrique tauromachique.
- Le grand cinéaste John Huston vient de faire un film complètement con, quoique pas déplaisant.
- Le vieux débat, à présent éteint, sur la question de savoir si John Huston est un génie ou un fumiste, avait laissé de côté la possibilité qu'il soit les deux.
Éditions : Nouvelles éditions du Wombat (Les Intempestifs) 2020.
* L’intégrale des chroniques de cinéma de J.P. Manchette, parue dans Charlie Hebdo de 1979 à 1982.
Autres titres de cet auteur sur ce blog :
Laissez bronzer les cadavres (avec J.P.Bastide).
Ô dingos ô chateaux.
Chroniques.

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