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Littérature d'Irlande,de Bretagne et aussi d'ailleurs
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2 novembre 2013

JAOUEN Hervé / Gwaz-Ru.

 

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Gwaz-Ru.
Hervé JAOUEN.

Note : 5 / 5.
Ô Rebelles, mes frères *
La vie en sud Finistère dans la première moitié du XXe siècle, années qui verront les plus grands changements dans ce que l'on peut appeler "Le vieux pays". Deux guerres, des dizaines de milliers de morts, le progrès, la perte de la langue et du monde rural, voilà en peu de mots l'époque de ce roman.
Gwaz-Ru naît avec le siècle en 1900 dans la région de Briec, forte tête et grande gueule, il quitte son travail de journalier à la campagne. Pris en main et aidé par Bodiger, il trouve vite du travail dans le bâtiment. Il a comme voisin, dans la misérable chambre qu'il loue, Vincent, professeur de philosophie qui l'éduque et tente de dégrossir le jeune homme quasiment analphabète dont le breton est la langue natale. Ce n'est pas toujours l'entente parfaite entre eux, l'intellectuel souffreteux et le travailleur manuel en pleine possession de ses moyens physiques.
Gwaz-Ru rencontre Tréphine, il se marie en toute simplicité, ni l'un ni l'autre n'étant des catholiques fervents, ni pratiquants.
La période est troublée. La vie de Gwaz-Ru et de Tréphine ne sera pas de tout repos, des enfants naissent, Gwaz-Ru devient un témoin passif, mais critique du monde politique. Vincent lui montre du doigt les incohérences du communisme et des bruits de bottes se font discrètement entendre en Allemagne.
La famille retourne à la campagne et aux travaux de la terre, une autre vie comme qui dirait un départ "Aux Amériques". Avant son départ, ses "Camarades de cellule" lui réserve une ultime humiliation! Et chose étonnante pour lui, il trouve estime et réconfort chez les ecclésiastiques pour qui il travaille. D'autres enfants naissent à la campagne, ce n'est pas la richesse, mais une certaine aisance que procure un dur labeur.
Les bruits de bottes se font plus fort, les accords de Munich ne règlent rien, les républicains espagnols sont vaincus ; la guerre est en marche. Et elle laissera des séquelles partout et même à Goarem-Treuz. Gwaz-Ru, comme beaucoup, ne sera ni un héros ni un collaborateur, il cherche à faire vivre ses proches, défendant ses convictions, adoptant profil bas quand c'est nécessaire. Mais les événements vont en quelque sorte l'obliger à choisir son camp.
À plus ou moins brève échéance, les guerres se terminent tôt ou tard....après vient le temps des questions !
Nicolas Scouernec, plus connu sous son surnom "Gwaz-Ru" (L'homme rouge, le Communiste), est un personnage haut en couleur, rétif à toutes autorités ; sa devise aurait pu être " Na ruz, na gwen", ni rouge ni blanc ou ni Dieu ni maître" et malgré tout il n'est pas un individualiste forcené. Juste un homme entier.
Tréphine, épouse aimante et fine psychologue ; elle devine les soucis de son époux , ses errements politiques . À l'ancienne mode de Bretagne, ils se vouvoieront toute leur vie.
Vincent, son voisin qui deviendra son ami, normand solitaire, professeur de philosophie. Il sera une sorte de mentor et d'éducateur, lui ouvrant les yeux sur la face cachée de certaines doctrines. Malheureusement un jour, penser lui deviendra insupportable. Tant de questions restent sans réponses.
Des apparatchiks comme on aimerait qu'ils n'en existent plus, des hommes d'église jugeant un travailleur sur sa valeur et non pas sur ses croyances, des "anciennes personnes" partageant leurs terres et leurs vies, des résistants hélas novices sont les personnages de ce roman qui comme
"Au-dessous du calvaire" traite de la guerre en Bretagne. La vie de gens ordinaires dans des temps qui, eux, ne le sont pas.
À noter que l'auteur utilise beaucoup de mots bretons pour les dialogues entre les personnages, le breton était pour la plupart d'entre eux leur langue maternelle.
Comme j'ai pu le constater dans ma famille, les femmes étaient plus à même à accepter une certaine domination de la religion catholique dans la vie de tous les jours. Je pense que par opposition les hommes avaient plus souvent des idées de gauche et votaient volontiers communistes et se considéraient comme des "bouffeurs de calottes".
Extraits :
- L'homme rouge devenait fleur bleue.
- Red e anavezout araok karout.
(Il faut connaître avant d'aimer).
- C'est souvent à cause des femmes qu'on perd des camarades. Elles les retournent contre le parti.
- Grâce à la langue bretonne, sanctuaire de l'euphémisme et de l'antiphrase, il possédait en sus l'aptitude à desceller la parole traîtresse et la faculté de manier à son tour l'illusion maligne et le double sens.
- En breton les paroles sont souvent plus claires qu'en français.
- Les gosses seraient émerveillés, et les cantiques en breton feraient fondre le cœur de Tréphine.
- Un gars qui change l'eau en vin, faudrait être con pour ne pas le suivre.
- Des hommes et des femmes costumés de la chorale de Labour ha Kan se regroupèrent autour de Marcel Cachin pour entonner l'International en breton.
- Deux mots nouveaux apparurent dans les conversations en même temps que l'instauration du S. T.O. : collabo et maquis.
Éditions : Presses de la cité (2013).
* Xavier Grall (Allez dire à la ville)

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