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Littérature d'Irlande,de Bretagne et aussi d'ailleurs
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18 mars 2013

BOLGER Dermot / Une seconde vie.

 

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Une seconde vie.

Dermot BOLGER.

Note : 4,5 / 5.
Au nom de la mère et du fils.
De cet auteur j'ai lu et aimé, il y a relativement longtemps, quelques romans*, puis moins ses dernières productions. Ce titre combine ces deux époques, car c'est en quelque sorte aussi une renaissance, mais surtout une réécriture. En effet la première mouture "Le ventre de l'ange" date de 1994, et je ne l'avais pas lu, donc découverte complète.
Ce livre commence par une très intéressante note de l'auteur qui nous explique d'où lui est venue l'idée de ce roman, et son contexte historique qu'il ne faut pas oublier, ces années où l'Irlande découvrait le scandale des Magdalene Sisters.
Un homme réchappe miraculeusement de la mort, ou mieux il revient du royaume des morts! Alors pour lui il est l'heure de repenser sa vie et de revivre des moments douloureux. Commence pour lui la quête d'un fantôme, sa vraie mère, la biologique, car depuis l'âge de 11 ans il sait qu'il est un enfant adopté, avec ce que cela comporte de problèmes humains, de relations avec ses camarades d'écoles, cruels comme tous les enfants. Cela semblait loin, sa vie de famille est somme toute comme celles de millions de couples, ni parfaite, ni exécrable. Des souvenirs affluent avec beaucoup d'interrogations : qui est-elle? que fait-elle et où? pourquoi l'avoir abandonné?
Pendant ce temps, en Angleterre, Elisabeth en face terminale d'un cancer, revit sa jeunesse, cette soirée où elle a décidé de se donner à un homme, sauf s'il est irlandais...et il n'est pas irlandais!
Mais les suites de cette aventure sont pour l'époque, un motif de rejet de la société irlandaise dominée par l'église catholique.
Pour elle comme pour lui, le jeu en vaut-il la chandelle ? Cette quête est-elle utile, ne va-t-elle pas faire plus de mal que de bien?
Beaucoup de personnages dans ce roman, la famille Black, Sean, photographe pour qui les quelques secondes passées dans la mort vont changer sa perception du monde et de sa vie. Il devient obnubilé par la recherche de sa mère biologique. Il devient un fantôme cherchant un autre fantôme. Son épouse et ses enfants deviennent des quasi inconnus qu'il croise parfois lorsqu'il rentre chez lui.
Ses parents, sa mère, femme au foyer à l'ancienne, élevée dans une famille farouchement républicaine. Son père, lui aussi passionné de photographie, qui, comme les photos a un côté négatif, un peu magouilleur, commettant quelques larcins et qui dut être un grand séducteur, le contraire du mari modèle qu'il est chez lui.
Sa tante Cissie, la mémoire de la famille, qui lève un peu le voile sur ses origines. Mrs Lacey, femme impressionnante qui a droit de retrait des enfants d'une famille si elle le juge nécessaire.
Elisabeth (Lizzy) et sa famille, Jack son mari aimant mais effacé, ses trois filles et leurs maris, elle n'a d'estime ni pour elles, ni pour eux. Sa vie est morne, elle erre sans but la nuit. Malgré le cancer qui la ronge, elle n'a plus qu'un but dans ce qui lui reste d'existence, retrouver Francis "Petit Garçon Bleu". Ni Tom, son frère à la sexualité refoulée, devenu prêtre, ni sa sœur Ellen ne purent s'opposer à la volonté familiale.
La société actuelle passée au prisme de l'Irlande entre l'homme d'affaire cynique, ancien orphelin et le mineur qui perd son travail, son épouse de maladie et qui au bout du rouleau choisit le suicide entraînant sa petite fille dans la mort. Ou Gerry, l'ami journaliste, enquêteur désabusé qui a baissé les bras, las de dénoncer le monde politique et la corruption institutionnalisée. Ce livre pose encore une fois la question de la congrégation des "Magdalene Sisters" et le pouvoir absolu, quasiment de vie ou de mort, sur des jeunes filles surtout, dont le seul tort, soi-disant, étaient d'avoir eu des relations sexuelles avant le mariage. Tout cela n'a pu se faire qu'avec la complicité de l'église catholique et de l'état irlandais. Les vagues excuses dites du bout des lèvres par les autorités semblent dérisoires et peu convaincantes, l'argent n’efface pas les horreurs commises et ne répare pas grand chose! Où était la bonté chrétienne durant toutes ces années! Quelle hypocrisie!
Un constat terrifiant sur l'Irlande bigote de l'après-guerre et les séquelles qui existent encore maintenant!
Extraits :
- À Sligo, elle était une pécheresse, mais elle était avec ses semblables, ses cris mêlés aux sanglots de la fille de Rosscommon allongée dans le lit à côté. Dans la ville de Coventry, alors en pleine reconstitution, elle n'avait personne à qui se confier.
- Vos mères étaient toutes des prostituées, lui répétait une religieuse. Si jamais tu rencontres la tienne après avoir quitté l'abri que nous t'offrons ici, crache lui au visage.
- N'avions pas appris à remettre en cause l'autorité. Les choses étaient ce qu'elles étaient, point à la ligne.
- L'Irlande dans laquelle elle vivait était infectée par un terrible virus appelé respectabilité.
- Elle n'avait même pas eu d'enfants, et ses parents étaient morts, et elle s'était retrouvée seule au milieu de ses frères. Elle était considérée comme trop grande tentation.
- Les temps ont changé, c'est vrai, penser qu'à l'époque qui n'ont même pas laissé cette pauvre fille assister à l'enterrement de sa mère.
- Vous n'êtes plus toute jeune. Aucun homme n'aime découvrir qu'on lui a vendu une marchandise usagée. Penser à tout ce que vous pouvez perdre. Vous avez suffisamment déshonoré votre fils. Essayez pour lui de vivre maintenant un peu plus dignement.
- Peut-être elle me repoussera, mais c'est un risque que je dois prendre, aussi bien pour elle que pour moi.
- J'ai maudit ma mère jusqu'à la tombe. Mais à quoi servirait que vous en fassiez autant ? Mes parents appartenaient à un autre âge.
Éditions : Joëlle Losfeld (2012)
Titre original : A second Life (2011).
* autres chroniques de Dermot Bolger :
La ville des ténèbres.
La musique du père.
Un Irlandais en Allemagne.

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Commentaires
L
Super billet ! Je suis contente que tu ais aimé :-)
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S
Hello Yvon !<br /> <br /> Ce livre est dans le prix Cézam. Je ne l'ai pas lu mais les membres de mon comité de lecture qui l'ont lu ne sont pas emballés. Ton avis m'encourage un peu plus à le lire.
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Littérature d'Irlande,de Bretagne et aussi d'ailleurs
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