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Littérature d'Irlande,de Bretagne et aussi d'ailleurs
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4 avril 2012

GRALL Xavier / La génération du Djebel.

Trilogie : Le silence des appelés ! Livre 3.
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La génération du Djebel.
Xavier GRALL .

Note : 4 / 5.
Le monde du silence …................
Œuvre à part dans la bibliographie de Xavier Grall. Celui-ci est secrétaire de rédaction du journal « La vie catholique » qui lance une grande enquête sur la guerre d'Algérie. Nous somme fin novembre 196o, le journal publie (sans beaucoup de conviction) un questionnaire très étudié sur la question. Pratiquement mille réponses arrivèrent. Le livre décortique et explique les réponses. A signaler que Xavier Grall a « servi » au Maroc et en Algérie et comme beaucoup d'appelés de l'époque, ce qu'il en garde est surtout un sentiment de révolte et de honte. Contre lui-même et surtout contre la France. L'avant-propos et la conclusion sont de la plume de Xavier Grall, le reste recoupe des témoignages spontanés. Une dernière chose, en 1960, quand cette demande a été formulée par le journal, la guerre n'était pas finie ! La note donnée pour ce livre est très aléatoire car ce livre est difficilement classable et n'est pas de la littérature à proprement parler.
D'abord les chiffres, un échantillonnage de 607 réponses, principalement des hommes de troupes 327 ; des sous officiers 201 ; des officiers 71 ; certains (8) ne se prononcent pas ! Pour les professions : petits cadres, agriculteurs et ouvriers forment le gros de la troupe! Les militaires de carrière ne furent que 4 à répondre, mais les ecclésiastiques 29 ! La durée moyenne sous les drapeaux en Algérie en 1960 était il me semble de 18 mois. A noter que 135 hommes étaient fiancés et que 12 ont vu leurs promesses rompues et que 3 ont divorcés ou se sont séparés de leurs épouses.
À la question :
À votre avis, les Européens sont-ils ?
Médiocres 275
Réservent leur jugement 140
Mauvais 118
Bons 48
Ne répondent pas 28.

D'où ce témoignage :
- Beaucoup de petits faits marquent ainsi le militaire et certains jours il taperait bien plus facilement sur le pied-noir que sur l'Arabe.
Dans les courriers une rubrique est particulièrement intéressante, meilleurs et plus mauvais souvenirs, beaucoup avouent avoir plus de mauvais souvenirs que de bons. La mort de soldats du contingent souvent jeunes très souvent citée.
Le racisme est aussi une chose que les conscrits ont remarquée, la torture a choqué beaucoup d’appelés, mais qui renvoie dos à dos les deux camps pour les horreurs perpétrées pendant cette guerre ! Tortures d'un côté et mutilations des cadavres de l'autre !
Il est difficile de se faire une opinion sur l'écriture de ce livre, chacun des participants, auteur de témoignages ou de lettres à sa famille, venant d'un milieu socioculturel et ayant un niveau d'études très différents les uns des autres. Mais tous font preuve d'une grande sincérité, et certains un repentir profond. Mais pour beaucoup d'appelés, un sentiment de temps gâché, d'innocence perdue, de honte et de culpabilité, et cette question : est-ce que cela en valait vraiment la peine ?
Un réquisitoire contre la guerre en générale et aussi celle dite « coloniale » qui est toujours perdue, car un homme humilié n'ayant plus rien à perdre tentera en dernier ressort de retrouver sa propre dignité ! Et celle de son pays !
Ce livre se termine par « Journal d'un Para » d'où j’extrais ces quelques lignes :
-C'est une chose écœurante de voir que des jeunes gens appelés viennent se faire crever la paillasse pour rétablir l'ordre et défendre les intérêts de ces Français et eux se bouffent le nez entre eux. À mon avis, on devrait agir avec eux comme ils le font avec les rebelles.
Extraits :
- Si cet homme n'était pas fellaga, il le sera devenu.
- Mon meilleur souvenir. J'ai parlé de la paix avec un vieux musulman qui avait son petit-fils près de lui et il m'a presque cité mot pour mot, la parole de Péguy : « tout ce qu'on fait, on le fait pour les enfants. »
- Que cette guerre cesse et cesseront ses conséquences : la « gégène», les grenades dans les cafés, les obus de 105 rue d'Isly !
- Je n'exagère pas. Ces cinq mois étaient interminables. Et des jeunes y ont passé vingt-quatre et vingt-sept mois !
- Je citerai ces mots d'un aumônier : « quand on passe huit jours en A.F.N. on écrit un article- deux mois, un livre – quand on a passé plus d'un an, on la ferme. »
- Arrêtons. Ne confondons pas enquêtes anodines et examen de conscience.
- Pour d'autres, le silence vient d'un terrible sentiment de culpabilité sur deux fronts : celui de la guerre et celui de la misère. Lorsqu'on retrouve une vie civile normale on est désorienté.
- Il lui fallut un bout de temps pour « digérer » nos sept mois de bled et nous refaire à la vie du séminaire.
- De tous mes camarades appelés, nous n'étions que deux survivants. J'ai gardé de cette nuit et des traîtres un sentiment d'horreur et de dégoût.
- On s'acharne avec une sorte de plaisir sadique à tirer sur une chose qui bouge. Cette chose est un homme. Je ne me rends pas compte que par mes ordres je suis un semeur de mort.
Éditions : Le Bateau-Livre (1994) réédition de l'édition de 1962.

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