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Littérature d'Irlande,de Bretagne et aussi d'ailleurs
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22 septembre 2011

GUILLOU Anne / L'enclos d'ébène

L'enclos d'ébène
L'enclos d'ébène.
Anne GUILLOU .

Note : 4 / 5.
Gwen ha du !
Quatrième ouvrage de cette auteur chroniqué sur ce blog. Ici, un recueil (au format très inusité) de 15 nouvelles, séparé en trois chapitres « Introduction » , « Silhouettes » et « Quotidien désarticulé ».
Ces nouvelles mélangent le blanc de la Bretagne et le noir de l'Afrique où Anne Guillou a résidé plusieurs années, ce qui explique le titre de cette chronique.
Le quotidien vu à travers l’œil acéré d'un témoin comme dans le premier récit de ce livre « Villégiature » ! Texte, (une lettre peut-être ?) expliquant la vie d'une bourgade à un correspondant cherchant un lieu de vacances. Quelques quatre pages plus loin ce village nous semble familier, on a presque l'impression d'y habiter et que les personnages sont en définitif nos voisins....Un très beau texte plein de pudeur et aussi de nostalgie. La vie qui passe, la santé qui décline, un corps fatigué.....
« Une sanitaire » se passe en Afrique, grâce à l'argent tout s'achète, tout se loue, il est même parfois question de reprise, mais c'est au nom de la coopération et d'un contrat à durée déterminée....un texte sur les pratiques de certains européens, pas à leur avantage.
Pas plus que dans « Une vie de boy » Madame et ses serviteurs, Madame et son amant, mais Madame est grugée....et le mérite bien, donc ne la plaignons pas. Réflexion amère sur la bourgeoisie blanche, prétentieuse et désœuvrée.
« Tante Lucie » fait aussi partie des personnages qu'il nous semble avoir côtoyés. La tata célibataire, gentille mais un peu stricte, la vieille fille qui habite loin, travaille chez un officier de marine, qui pour suivre la famille, déménage. Elle élève des enfants qui ne sont pas les siens et s'occupera des petits-enfants...Ici aussi l'âge viendra, la retraite bien maigre, la religion et une petite maison.....c'est cela la vie ???? Un très beau texte, à mon goût le plus touchant du recueil.....L’ingratitude et le mépris vis à vis de cette femme sont très bien résumés dans les quelques lignes qui terminent ce récit.
« Le privilège de l'âge » est aussi une histoire simple, un vieux lecteur face à une jeune bibliothécaire, l'un a la chance de lire, l'autre, mère de famille élevant seule ses enfants, a la chance d'avoir un travail....Un jour elle aussi aura le temps pour s'installer confortablement....plus tard....La vie c'est la naissance tant désirée par Ambroise et son épouse, mais rien malgré leurs efforts, il reste la magie....mais là-bas aussi l'argent...
La vie c'est la mort, un « accident » en Afrique, un « fait-divers » en Bretagne, la mort n'est jamais douce mais elle est parfois très dure et soudaine. Et immérité, comme ce couple victime d'un mystérieux logo qui met tout un pays en émoi....alors seule la mort des soi-disant coupables peut sauver la face des puissants de ce monde. Cauchemardesque !
Beaucoup de personnages très ordinaires dans ces chroniques de la vie quotidienne. Pas très ordinaire malgré tout la vie de Grace, jeune africaine, femme objet, un artiste, deux femmes amies de très longue date vivant le mini-drame de l'une d'elles, petit problème domestique qui les fait passer des larmes au rire. Un femme qui attend et se remémore sa vie, sa « Traversée » pense-t-elle. Soeur Anne-Marie, elle, étouffe sous le poids des traditions ancestrales, l'ainée mariée au pays, la cadette rentre dans les ordres...ainsi va la vie.....Dieu veille sur nous....souvent mais parfois il a l’œil ailleurs...l'automne n'est pas toujours une belle saison, c'est souvent celle de l'exil.
Je dois reconnaître que j'ai éprouvé une certaine difficulté à la lecture de plusieurs récits, un peu hermétiques à mon goût. Mais ils sont largement minoritaires.
Le lecteur passe de la Bretagne à l'Afrique avec bonheur, du soleil éclatant à un ciel voilé, des africains exubérants aux bretons taiseux, ombre et lumière.
Une préface de Marcel Postic, donne quelques renseignements sur l’œuvre d'Anne Guillou.
Extraits :
- La force physique inspirait l'acte, non des discours. Pas de mots pour la vie, quelques mots pour la survie.
- Elle l'a surpris en larmes, l'autre jour seul dans l'écurie. Il y a cinquante ans, interdit de tout labeur.
- Et la petite culotte blanche que tu lui fais laver chaque matin, crois-tu que ça le fasse bander ? Est-ce qu'il s'est habitué à nettoyer les désastres rouges sur la broderie anglaise ?
- Debout, le châle bien mis, la coiffe fière, le tablier lourd de broderie tombant parfaitement, elle paraît grande.
- Peu à peu, les cantiques bretons, poussés par mille voix, gagnaient sur les bruits profanes des manèges et des stands de tir.
- Lâchée par la Marine, elle se dévoua alors totalement à l'église.
- Elle trouva dans la terre fraîche du cimetière cette ombre protectrice dont elle n'avait jamais voulu sortir.
- Visage doux et ouvert que toute femme, je suppose, souhaite avoir au crépuscule.
- Maintenant, elle en percevait tout le bénéfice dans cette sédimentation de son être, modelé par des existences successives.
- Peut-être parce qu'il réunit en lui l'image du père, du savant, de l'initiateur à la culture, l'homme âgé, encore plus que la femme, inspire une tendresse reconnaissante.
- Quand elle aura retrouvé l'équilibre, quand les grands l'éreinteront moins, elle sera douce avec les vieux messieurs.
- Dans ce pays, les religieuses avaient occupé une place importante depuis un siècle. Non content de servir Dieu, elles avaient éduqué les filles, conseillé les femmes, lavé les morts. Elles jouissaient d'un réel prestige.
- Maintenant, il pense que les Blancs ont été source de son malheur, mais ce sont les Noirs qui l' achèveront.
- Un coin tranquille. Les vents dominants emportent tous les potins de Kermadec et du bourg vers la côte.
- Les premiers mois de la vie commune sont heureux et malheureux à la fois......Quand il caresse le velours de son cou et de son ventre, il pense que les bons fétiches le protègent.
Éditions : Éditions du Dossen. (1990).
Autres chroniques d'Anne Guillou :
La lanterne bleue.
Le désespoir tranquille des hommes.
Noce maudite.

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