Symphonie pour Anna
Bernard Mac LAVERTY
Note : 4
Une vie de musique!
Troisième roman de cet auteur nord irlandais, dont j'ai déjà parlé pour son premier roman "Lamb". Son deuxième livre "Cal" a été adapté au cinéma avec Hélène Mirren, Donald Mc Cann.
Catherine McKenna revient à Belfast pour les obsèques de son père
Elle était partie 5 ans plus tôt, on pourrait même parler de fuite.
Après de brillantes études musicales, elle ne travaille plus, ayant abandonné l'enseignement. Elle compose de la musique classique qui est jouée à la radio. Elle habite dorénavant à Glasgow.
Elle se remémore son enfance, avec son père catholique modéré et brave homme, qui tenait un pub ; elle repense également à son voyage à Kiev, chez un compositeur russe ; sa réussite scolaire ne lui a pas amené la vie dont elle rêvait.
Sa mère est plus stricte sur la religion et la notion de pécher.
Quand elle annonce à celle-ci qu'elle a un enfant, une petite fille, Anna, mais qu'elle n'est pas mariée, les relations redeviennent tendues.
Elle a eu cet enfant avec Dave, un anglais avec qui elle vît sur l'île d'Islay où elle est professeur de musique. Le climat y est rude et Dave boit de plus en plus.
Catherine Mc Kenna est un beau personnage de femme moderne tentant de sortir d'une éducation très rigoureuse, mais elle ne choisit pas la facilité en s'installant avec Dave, qui lui, vit du chômage et de pêche pendant la saison. Alcool aidant, il devient violent. Catherine s'enfuit de nouveau, mais elle n'est plus seule, Anna l'accompagne.
Un livre très intéressant, moins dur et désespéré que 'Lamb', mais il est vrai que le contexte n'est pas le même.
Il est, je pense, plutôt rare de trouver des livres sur les affres d'une jeune femme compositeur de musique classique, qui doit gérer en plus sa vie sentimentale, familiale, et se réconcilier, si possible, avec sa mère.
Très agréable lecture avec en plus quelques références à Henry Purcell, que je considère comme le plus grand musicien britannique(enfin mon préféré)de tous les temps (moment d'humour avec les chansons de taverne que composait le dit Purcell au pub du coin après sa journée de travail à la chapelle royale).
Extraits :
- Lorsqu'on annonça son vol, elle franchit le contrôle de sécurité, puis la sécurité spéciale réservée aux passagers en partance pour l'Irlande du Nord.
- "Ils répètent ici, au dessus de la ville, pour montrer aux catholiques qui est le patron. C'est leur manière de dire que les prods* sont les maîtres".
- Est-ce que le nationalisme de Janacek était différent de celui adopté par l'IRA Provisoire?
-Une catholique romaine qui utilise des tambours protestants. Le côté guerre et paix.
- Catherine pensa à la géographie des lieux de mort dans son propre pays -une carte qui n'aurait pas existé si les femmes avaient le pouvoir de décisions- Cormarket, Claudy, Teebane Crossroads, Six Mile Water, Bogside, Greystell, Shankill Road, Long Kesh, Dublin, Darkley, Enniskillen, Loughinisland, Armagh, Monaghan. Et ces lieux de mort collective, plus à l'est : Birmingham, Guilford, Warrigton. Comme une litanie.
-Ou les chants de la taverne de Purcell. Des envolées. Des voix qui glissent. Unissant musique populaire et musique d'art.
- Elle travaillait à une série de variations pour cordes sur un refrain de Purcell.
-La consommation d'alcool de Dave cessait d'être une habitude pour devenir un problème.
- Heaney avait écrit un poème 'Limbes' à propos d'une fille qui noyait son enfant illégitime "En le plongeant tendrement dans l'eau".
Titre original : Grace Notes
Editions : Hachette Littérature.
Autre chronique de cet auteur :
Lamb
*Prods: terme péjoratif pour désigner les protestants.