SAYERS Peig/ Peig.Autobiographie d'une conteuse irlandaise
Peig : autobiographie d'une grande conteuse irlandaise.
Peig SAYERS.
Note: 5 / 5 .
" Et le vieux monde aura déjà disparu ".
Peig ne sachant pas écrire dicte à Michéal, son fils, ses souvenirs, Elle est la dernière survivante du trio* des conteurs écrivains des îles Blaskett. Elle enregistrera 350 contes pour le comité de préservation du folklore irlandais. Elle possédait un vocabulaire de 80000 mots de gaélique, et servait de professeur aux plus grands linguistes de l’époque.
La vie d’une femme dans la péninsule de Dingle, puis dans la "Grande Blasket " qui fut évacuée définitivement en 1953.
Peig est née sur le "continent", d’abord servante depuis l’âge de 12 ans, elle est "donnée" à 19 ans, en mariage à un pêcheur des îles. Son mari est un homme bon et courageux, mais la vie est rude et elle ne connaît pratiquement personne, mais les îliens sont chaleureux. La mort est présente, la religion aussi. Les enfants meurent de bonne heure, les hommes aussi, souvent en mer, Peig aura 10 enfants, 7 survivront. Après l’accident qui coûtera la vie à Tomàs, son frère Muiris efface le prénom anglais qui est inscrit sur le cercueil pour le remplacer par la version gaélique. La défense de la langue est un devoir :
- "J’ai toute ma vie fait ma part de travail pour la langue irlandaise".
Après le décès du mari de Peig, l’exode est la seule solution pour les enfants, tous partiront en Amérique, un seul reviendra. Les anecdotes de sa vie et des histoires mi-réelles, mi-imaginaires racontées pendant les veillées nous plongent dans un monde simple, mais hélas disparu, Peig et son beau-frère aveugle y sont excellents et les voisins sont toujours les bienvenus. La vie devenant trop précaire, il faudra partir.
La couverture nous montre Peig, magnifique photo noire et sépia, la mine austère, la quatrième de couverture nous la montre, goguenarde, la pipe à la main, laquelle des deux est la vraie ?
Elle mourra à Dingle en 1958.
L’écriture est simple, voire naïve, mais il faut se remémorer le contexte. Le premier des deux contes qui clôt ce livre est très amusant et prouve que ces gens pauvres avaient le sens de l’humour et de la dérision.
A découvrir absolument.
Quelques chiffres :
en 1821 il y avait 128 habitants sur l'île, en 1925 /150 en 1947/ 50 et en 1953 au moment de l'évacuation il ne restait plus que 20 !
Le poète Desmond EGAN rend hommage aux îles et à ces auteurs dans son recueil de poésie « Peninsulia » :
Les fières chaumières s’affaissaient
De l’intérieur comme le gaélique et
Les vents d’Europe
Soufflaient par les fenêtres béantes.
O’Criomhthain, Peig Sayers , Muiris O’Suilleabhàin*.
Extraits :
- An Blascoad mór (La grande Blasket) ne fut pas la seule île habitée de l'archipel, mais elle en fut la principale. C'est là que Peig Sayers passera cinquante années de sa vie ….
- Je suis une vieille femme à présent, un pied dans la tombe, l'autre tout près du bord ….. il en a fallu des joies et des peines, depuis le premier jour de ma vie jusqu'à aujourd'hui même.
- Je revois clairement l'époque où l'irlandais fit son entrée dans les écoles. Notre école fut l'une des premières de la contrée à l'enseigner, et ce fut là tache plutôt aisée, car c'est dans cette langue que nous autres enfants de Dún Chaoin avions été mis au monde et élevés.
- Qu'une nouvelle fois, je faisais face à ma terre natale ; mais ce voyage n'était en rien semblable aux autres.
- « Ceci est un grand soulagement pour moi, car tu es le premier cadavre qui entrera au cimetière de Fionntrá dans un cercueil irlandais. »
- C'était le temps où les étrangers venaient nombreux sur l'île ; ils restaient même souvent un bon moment avec nous.
- « Je me souviens du temps où les gens se rassemblaient pour danser sur la lande. Le sonneur qui les accompagnait était surnommé le Chevelu, à cause de sa longue tignasse de cheveux gris. »
- On dit souvent que la perte du dernier être cher est la pire de toutes. Et voici que j'apprends il y a peu de temps, la mort de mon fils Pádraig 'aux États-Unis....
Éditions : An Here (1999).
Liste des ouvrages concernant les îles Blasket en français :
*O’Criomththain :Thomas O’CROHAN /L’homme des îles.
Peig SAYERS/Peig.
Muiris O’Suilleabhàin :Maurice O’SULLIVAN/ Vingt ans de jeunesse.
Eibhlís Ní Shúilleabháin: Elisabeth O'SULLIVAN / Lettres de la Grande Blasket.